Le PDI-P et le Golkar peuvent se réjouir. Les deux partis, annoncés grands favoris aux élections législatives du 9 avril prochain, n’auront pas à changer leurs plans dès cette année. Les élections générales de 2014 devraient appliquer les mêmes règles que ces dix dernières années : l’élection présidentielle ne pourra avoir lieu que trois mois minimum après les élections législatives et seuls les partis ou coalitions de partis ayant obtenu 25% des votes aux législatives ou 20% des sièges à l’Assemblée pourront y présenter un candidat. Cette règle a jusqu’à maintenant assuré aux grands partis le monopole des candidats à l’élection présidentielle et la certitude que trois prétendants maximum au poste suprême y prennent part.
Mais tout cela va changer à l’horizon 2019. La Cour constitutionnelle a en effet annoncé fin janvier que les élections législatives et l’élection présidentielle devront avoir lieu simultanément à compter de cette échéance. Dans son jugement, la Cour explique que le délai de trois mois entre les deux échéances électorales est inconstitutionnel puisqu’il n’y a pas de différence d’importance entre ces deux élections. Elle affirme aussi que cette décision permettra d’empêcher les coalitions de pacotille ou uniquement intéressées ainsi que les transactions politiques courantes dans la période de trois mois entre les deux élections et qui n’apportent que de l’inefficacité dans la gestion du gouvernement et donc du pays.
La décision est louable et semble aller dans le sens d’une plus grande équité dans le jeu politique indonésien en permettant à tous les partis éligibles aux législatives de présenter un candidat présidentiel. Le choix se fera dès lors entre davantage de candidats et il reviendra aux électeurs de choisir leur meilleur leader.
Ces différentes évolutions semblent faire preuve de bons sens rationnel et ont d’ailleurs été applaudies par la majorité des partis politiques, les observateurs et autres experts. C’est en revanche le timing qui fait polémique. Dans son jugement de fin janvier, la Cour constitutionnelle a ajouté une clause soumettant la date de 2019 pour cette reforme électorale afin d’éviter le chaos et l’incertitude légale lors des élections de cette année.
En cela, la Cour constitutionnelle a outrepassé son rôle. Elle est compétente sur les questions liées au respect de la Constitution mais en aucun cas ne peut juger de l’aspect technique d’une élection comme sa date par exemple.
Par ailleurs, il est apparu que la décision d’organiser élections législatives et présidentielle simultanément a été officiellement prise le 26 mars 2013, soit 10 mois avant d’être publiquement annoncée. Pourquoi ces dix longs mois entre la prise de décision et son annonce ? La Cour a expliqué que les raisons de ce délai étaient qu’elle fut prudente et très occupée par de nombreuses disputes légales liées aux élections locales.
Une autre conséquence de cette décision retardée est purement légale. En affirmant qu’il est inconstitutionnel d’organiser les élections législatives et présidentielle séparées dans le temps mais en ne voulant l’appliquer qu’en 2019, la Cour a indirectement jugée que les élections à venir cette année seront inconstitutionnelles. Les recours des perdants seront dès lors probablement nombreux. Ceux-ci ont d’ailleurs déjà commencé. Prabowo Subianto est mécontent et l’a fait savoir. Favori parmi d’autres de la présidentielle, son parti Gerindra n’est crédité que de 4 à 5% des intentions de vote aux législatives. Ce faible score ne lui permettra pas d’être en position de force au moment de négocier un ticket présidentiel, alors que les nouvelles règles électorales l’auraient replacé au centre de la course. Prabowo a lancé un recours légal. A un mois des élections législatives, il n’est donc pas impossible que celles-ci soient annulées. Ou repoussées. Ou contestées. 2014 sera définitivement une année politique riche en Indonésie. Riche ne voulant pas dire juste.