Accueil Média

La pornographie détruit le cerveau de l’enfant

Les cas de pédophilie qui viennent enfin de prendre le devant de la scène médiatique récemment pourraient être une occasion pour les Indonésiens de réfléchir à leur rapport à la sexualité. Mais, force est de constater que la vague de puritanisme qui s’est emparée du pays depuis l’arrivée de la démocratie ne facilite pas les choses. Ce puritanisme est un phénomène nouveau et les Indonésiens le doivent au retour des diktats religieux dans le discours public. Des diktats qui ont, avec le renforcement de la loi anti-pornographie et la généralisation de la censure, créer un climat de conformisme social qui ne favorise pas l’épanouissement sexuel. D’une parole relativement libre sur la sexualité, le pays est passé aujourd’hui à un conservatisme pétri de tabous et les problèmes s’accumulent : pédophilie, viol, prostitution, discrimination sexuelle, sans que personne ne sache comment les gérer. Notons qu’à cette liste de problèmes, les Indonésiens ajoutent aussi l’homosexualité…

Pour les gérer, il faudrait déjà savoir les nommer correctement. Le mot pédophilie par exemple : inconnu de l’Indonésien moyen il y a encore peu, ce terme n’était généralement utilisé dans la presse locale que pour désigner les exactions perpétrées par des étrangers à l’encontre d’enfants indonésiens (cf. La Gazette de Bali n°41 – octobre 2008). Une bonne façon de stimuler le sentiment nationaliste certes sur « cette maladie venue d’ailleurs », mais peu efficace quand il s’agit d’attirer l’attention du public sur l’accroissement des pencabulan perpétrés par les Indonésiens eux-mêmes et qui occupent pourtant des entrefilets tous les jours dans la presse. Et ce dans l’indifférence quasi générale. Notons au passage que même en indonésien, le terme reste vague puisque pencabulan désigne une action « cruelle et sale ». Bref, entre un mot indonésien imprécis et un mot étranger incompréhensible, difficile de parler aux enfants et de mobiliser contre ce fléau.

Avec l’affaire de la Jakarta International School, qui semble avoir été à l’origine d’une salutaire prise de conscience, le pays a sans doute fait un pas important dans la reconnaissance et l’identification du problème. Reste à y apporter les bonnes solutions. Malheureusement, les gens responsables des affaires sociales de l’Indonésie d’aujourd’hui sont souvent issus des partis musulmans de la coalition au pouvoir. Education, culture, communication, tous ces postes ministériels sont verrouillés par des gens qui ne prennent leurs décisions qu’à l’aune de leurs convictions religieuses. Ainsi, un séminaire récent vient de permettre à des spécialistes du gouvernement de s’exprimer sur le sujet de la violence sexuelle. Le thème en était : Dégénérescence du cerveau comme conséquence de la pornographie sur les élèves.

Lors de cette réunion qui a eu lieu à Bangka Belitung, le professeur Fasli Jalal, directeur du département de la Démographie et du Planning familial (BKKBN), s’est exprimé sur ce thème. « La dépendance à la pornographie sur Internet peut être considéré comme un déclencheur. La pornographie a pour conséquence d’accroitre les comportements sexuels criminels, que ce soit par la quantité ou le type. Par exemple, la violence sodomite qui commence à pointer dans la société aujourd’hui. » Selon ce professeur, dont les propos ont été retranscris dans le journal Suara Pembaruan, les violences sexuelles et la pornographie sont liés puisque ceux qui se livrent à ces violences ont souvent été inspirés par la pornographie sur Internet, sur des DVD ou dans des livres.

Et les sondages le prouvent. Un certain nombre d’enquêtes montrent que 59% des adolescents entre 15 et 19 ans ont déjà vu des films porno et 18,4% des adolescentes ont déjà lu un livre porno. Et puis, 80% des enfants ont déjà vu des images porno sans le faire exprès sur Internet. En 2012, 87% des ados ont accédé à de la pornographie online, en 2013, ce chiffre est passé à 93%, s’inquiète le professeur Fasli Jalal. « Plus le temps passe et plus cette dégénérescence est préoccupante », affirme-t-il avant d’expliquer pourquoi : « La pornographie endommage cinq zones du cerveau de l’enfant. Lorsqu’il voit une vidéo ou une image porno, son cerveau va produire de la dopamine, une enzyme chimique du cerveau qui produit un effet de jouissance mais aussi de dépendance. »

Le professeur indonésien explique que cette dopamine n’est pas un danger « dans des conditions normales » et qu’elle est même « très utile chez une personne saine. » Mais avec la pornographie, « le cerveau reçoit une stimulation trop puissante qui provoque la dépendance. Un surplus de dopamine sort et détruit les cellules du cerveau. Le niveau de destruction est le même que si l’enfant avait subi un accident. » Heureusement, il n’est jamais trop tard, le ministère des Communications et de l’Informatique déploie une énergie considérable pour essayer de censurer la pornographie sur Internet et, comme le rappelle l’éminent professeur Fasli Jalal : « Tout doit commencer par la famille. Les parents doivent trouver le temps de communiquer afin de planter les graines d’un bon comportement et inculquer les valeurs religieuses à leurs enfants. »

Pas de sex tape entre mari et femme

Pendant ce temps, dans la presse musulmane, on se pose des questions. Un lecteur demande dans le journal Era Muslim si on peut se filmer pendant l’acte sexuel. « Est-il autorisé de prendre des photos des parties intimes de sa femme ou de se filmer en train de faire l’amour entre époux ? demande-t-il dans le courrier des lecteurs, puisqu’il est interdit de regarder les parties intimes des autres et de visionner des films porno. » Rappelons que la dernière mouture de la loi anti-pornographie du pays, concoctée par les partis musulmans de la coalition SBY au pouvoir, n’interdit pas expressément ce genre d’activité dans le cadre du couple marié et à condition que cela reste à usage privé. Rappelons aussi que le chanteur Ariel est passé par la case prison après que deux vidéos le montrant dans ses ébats avec des célébrités féminines aient été diffusées sur Internet par une connaissance mal intentionnée (cf. La Gazette de Bali n°62 – juillet 2010).

L’ustadz (professeur d’islam) d’Era Muslim répond à ce lecteur curieux en citant tout d’abord les hadiths qu’il explique et commente ensuite de la façon suivante : « Même pour consommation personnelle, il est interdit au mari de prendre en photo les parties intimes de son épouse ou de filmer leurs ébats amoureux car il n’est pas exclu que ces images soient vues un jour par une tierce personne de façon accidentelle. Cela pourrait ouvrir les portes de l’adultère ou faciliter l’accès au péché des gens qui regarderont ces photos ou ce film au cas où ils leur tomberaient dans les mains. » Donc, c’est niet.

Le triolisme pas bon pour la santé… de la femme

A l’autre bout de la société indonésienne, dans le premier numéro du magazine féminin numérique à télécharger FEM, destinée à la classe moyenne urbaine naissante, on se pose d’autres questions, plus audacieuses en apparence : Le triolisme, normal, ou anormal ? En intro, la rédactrice rappelle que c’est là avant tout un fantasme d’homme puisque « la partie du cerveau qui est consacrée au sexe est deux fois et demie plus grosse chez l’homme. » La photo qui illustre l’article montre d’ailleurs un homme avec deux femmes. Puis elle poursuit ainsi : « Contrairement à l’étranger, le threesome en Indonésie n’est pas encore quelque chose de familier. Le facteur santé aussi est une des raisons pour lesquelles les femmes ont peu envie de faire un threesome. Une femme qui fait une double pénétration risque de blesser son organe intime et risque aussi des MST. »

Alors, normal ou anormal ? « Le triolisme est souvent catégorisé comme de l’hypersexualité qui a besoin d’être contrôlée par une psychothérapie. Mais, il n’est pas encore sûr que cela rentre dans la catégorie des anomalies sexuelles. Si cela ne reste qu’un fantasme, on peut dire que c’est normal mais si cela est réalisé déjà plein de fois et qu’il est difficile d’arrêter, il est préférable de rencontrer un sexologue pour une prise en charge  », conclut la rédactrice. Mesdames de la classe moyenne, vous voilà informées sur l’amour à trois ! Enfin, on n’est pas très sûr quand même…

LAISSER UNE RÉPONSE

Please enter your comment!
Please enter your name here