Les rôles sont pour l’instant très bien répartis : à Joko Widodo (Jokowi comme il est surnommé par tous les Indonésiens) les apparitions publiques, les visites de terrain et l’image de la ville. A Basuki Tjahaja Purnama (surnommé Ahok, vice-gouverneur) la gestion quotidienne de la pléthorique administration locale. Le premier, Javanais, traditionnellement poli et respectueux, a d’ores et déjà fait oublier l’image arrogante, cassante et colérique de son prédécesseur Fauzi Bowo. Le second, chrétien d’origine chinoise, au style très direct, n’a pas peur de mettre les responsables locaux, trop souvent engoncés dans leurs privilèges et leur inaction, face à leurs responsabilités.
Ahok lui n’a pas hésité, dans un souci de transparence auquel les fonctionnaires sont peu habitués, à filmer ses réunions avec l’administration et à les rendre disponibles à chacun sur YouTube. L’initiative a là encore enchanté les électeurs. La première vidéo a été vue par plus d’un million de personnes. Après un peu plus de cent jours à la tête de Jakarta la cote de popularité de Jokowi et Ahok n’a donc pas encore connu de tendance à la baisse. Il serait pourtant naïf de penser que cela s’étendra sans effort dans la durée. Malgré une transparence nouvelle et appréciée, la nouvelle paire exécutive ne conservera le crédit dont elle bénéficie que si elle parvient à s’attaquer efficacement aux maux de Jakarta. Ceux-ci sont nombreux mais chacun sait les priorités : transports et inondations.
Jokowi a déjà lancé plusieurs programmes, notamment les cartes donnant accès aux soins et à l’éducation pour les plus pauvres. Initiatives populaires et populistes par excellence, celles-ci font désormais partie du tronc commun offert par chaque candidat à chaque élection, partout dans l’archipel. On attend davantage de Jokowi, et si de Solo, où il fut maire juste avant, celui-ci avait une vision forcement limitée des affres de la capitale, les récentes inondations doivent marquer le vrai départ de son action.
C’est « grâce » aux inondations que ces différents projets ont été rapidement soutenus par le président. Jokowi doit désormais profiter des circonstances pour mettre tous ces projets à exécution. Rapidement. Avant que l’émoi suscité par les effets de la pluie ne retombe.
Dans le même temps, le gouverneur est attendu sur les transports. 2013 doit être l’année du commencement de la construction du MRT. Elle doit être une année de refonte des services du TransJakarta et d’une solution pour limiter les déplacements automobiles dans la ville.
Toutes ces initiatives, qu’elles soient liées aux inondations ou aux transports, ne pourront toutefois jamais être couronnées de succès sans une prise de conscience individuelle et collective des habitants de Jakarta. Ceux-ci sont à la fois une cause et une solution aux problèmes. Leur manque d’éducation au volant contribue à la situation sur les routes et leur manque d’éducation environnementale contribue aux inondations. Un changement des consciences par l’éducation et la répression permettrait le succès des initiatives précédemment exposées.
Face à tous ces défis Jokowi peut compter sur le soutien du peuple. Et pas seulement celui de Jakarta. Grâce à son image et à sa communication, Jokowi est devenue une icône nationale. Cette image doit lui servir à mener ces projets à bien.