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Le lotissement à la Balinaise

J’étais bien content de m’installer dans un lotissement balinais. J’y avais trouvé une maisonnette, presque neuve, au fond d’un cul-de-sac, au loyer modeste : l’affaire me paraissait parfaite ! Mais ma vision idyllique d’un chez-moi pénard ne tenait pas compte du voisinage.
Dès l’aube, je suis tiré du sommeil par les voix criardes des voisines, le braillement de leur bébé lors du mandi, et la pétarade du knalpot défectueux d’une moto allumée juste sous ma fenêtre. Caquetage de volaille et couinements porcins dans les jardins, cris aigus des gamins et bavardages de commères dans la ruelle : voici mes journées. La nuit, aboiements de clebs et jérémiades de matous transforment mes rêves en cauchemars.

À côté de tout ce tapage, les reconnaissances acoustiques des marchands ambulants paraissent plutôt sympathiques :
ROTI ENAK – MEGA BAKERY
Tôt le matin, le vendeur de pâtisseries fonce sur sa mobylette au haut-parleur tonitruant. Quand frigo et ventre sont vides, je saute vite au portail pour m’approvisionner en viennoiseries.
KRUPUUUUUK
Parmi les chips aux arômes et aux colorants les plus divers, salés ou sucrés, à base de riz ou de maïs soufflé, il faut essayer ceux bleu fluo au goût de durian ! L’achat quotidien obligé : au bout de 24 heures, les krupuk sont complètement ramollis.
JAMUUUUU
Une gentille pédaleuse, mi-herboriste, mi-médecine-woman, mi-sorcière (tiens, ça fait quatre tiers !), transporte quantité de bouteilles aux liquides colorés, sensés à remettre sur pied le plus achevé des malades. Vu ses nombreux arrêts devant les maisons voisines, je suis le seul incrédule du coin.
POUËT POUËT
Un klaxon annonce la roulette du marchand de glace traditionnelle. La glace à l’eau, parfumée au fruit du jour, macère dans un caisson en bois et se liquéfie au fil de la journée. Le soir, cette bouillie sera recongelée et remise en vente le lendemain. Friandise adorée des gamins – terrain dangereusement pathogène pour le Bulé que je suis.
I-I-I-I-I-I-I-I-I-I-I-I-I-I
Un malin, le vendeur de gâteaux de riz ! Le bouchon de sa chaudière à vapeur émet un sifflement casse oreille qui ne s’arrête que quand il le retire pour la fabrication de ses gâteries saupoudrées de flocons de noix de coco. Dès qu’il a encaissé mes 2000 Rp, il remet l’agaçant bouchon siffleur. Sucreries savoureuses et pâtissier astucieux !
SOOOOL SOOOOOL
Mes sandales partent en vadrouille et j’écume vainement tout le quartier pour les faire recoudre. Quand j’apprends que ce cri est poussé par le cordonnier ambulant (sol=semelle) mes claquettes sont recousues à domicile en l’espace d’un quart d’heure.
CLIQUETIQUET CLIQUETIQUET
Une cuillère frappée contre une gamelle en zinc annonce le « mie ayam », une soupe de vermicelles au poulet, sapide à souhait !
Il me reste encore à identifier multitude de sonnettes (bakso ?), cliquetis (fruits ?), et cris variés (rémouleur, chiffonnier ?) de ce défilé permanent, mais pour le moment cela dépasse mes facultés de récognition.

Apparemment, je suis le seul résident du lotissement à être incommodé par ces innombrables bruits, qui restent néanmoins dans la limite du supportable. Mais voilà que mon voisin chinois se lance dans la fabrication de meubles à domicile et la scie électrique pousse ses hurlements stridents du matin au soir ! Ah, j’ai voulu élire domicile à coût modéré … ce sont mes oreilles qui en paient le prix maintenant.
Silence !!!

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