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TOUT VA TRES BIEN MADAME LA MARQUISE

Venir ? Ne pas venir ? Partir, rester ? Annuler ? Depuis que le mont Agung montre des signes indéniables de réveil, ces questions sont dans toutes les têtes. Mais pour les autorités locales et les officiels du tourisme, il n’y a pourtant vraiment pas de quoi en faire un fromage. A peine 12km, pas plus. C’est-à-dire le rayon de la zone de danger autour du volcan. Et d’ailleurs le mot danger est sans doute un peu trop dramatique. On devrait plutôt parler d’une zone (petite) de perturbation ou encore de dérangement. A savoir quelques kilomètres carrés où par principe de précaution, il faut bien dire qu’on est allé en quelque sorte perturber ou déranger la vie quotidienne des 150 000 personnes qui vivaient là pour les évacuer vers des camps de réfugiés. L’idée étant qu’ils ne soient pas directement exposés à une explosion de la montagne et à une éventuelle coulée pyroclastique qui incinérerait tout sur son passage. Une issue qui reste à ce stade très hypothétique, en gros du 50 / 50.

Mais allons au fond des choses et admettons un instant que ça explose. Qu’on se rassure, les dégâts ne seraient de toute façon limités qu’à quelques attractions touristiques du Nord-Est de l’île. Il resterait toujours parfaitement possible d’admirer par exemple un coucher de soleil à Tanah Lot, de faire des selfies à Bedugul ou de se rendre au GWK pour essayer de comprendre ce qu’on peut bien y faire. Quant à l’éventualité d’un nuage de cendres entrainant une fermeture de l’aéroport, tout est déjà prévu. Bien sûr, affirmer que les avions pourraient toujours décoller de Bali en cas d’éruption serait un bobard trop flagrant. En revanche, promettre une abondance de bus et de bateaux pour rediriger les passagers vers les aéroports de Surabaya ou de Lombok, c’est juste ce qu’il faut… Alors voilà, tout est donc sous contrôle et il reste absolument raisonnable pour tout un chacun de venir séjourner à Bali malgré la menace d’une éruption qui de toute façon n’arrivera pas. On ne va quand même pas se laisser pourrir la vie par un volcan.

Nous voilà rassurés mais tout le monde ne semble pas convaincu. Que les conditions de sécurité restent suffisantes pour le tourisme, c’est une chose. Mais est-il seulement souhaitable ou moralement acceptable de venir passer des vacances au paradis à quelques kilomètres d’une catastrophe naturelle potentiellement majeure et de dizaines de milliers de rescapés vivant dans des conditions extrêmement précaires ? Une question certainement légitime mais dans une île plus que jamais économiquement dépendante du tourisme, une chute de la fréquentation tiendrait plus de la double peine que d’une sorte de pudeur bienveillante. Un dilemme que dans le monde merveilleux d’Airbnb on a su anticiper en suggérant aux propriétaires de villas d’accueillir gratuitement chez eux des réfugiés ou des volontaires. Car c’est vrai que, quand on a tout perdu, pourvoir profiter d’une piscine et du wifi gratos, ce n’est pas grand-chose mais c’est déjà beaucoup. Cœur avec les doigts.

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