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Une censure à deux poids, deux mesures

« Le meilleur Indonésien est un criminel », aurait-on pu lire au bas de l’affiche du dernier film de Rudi Soedjarwo si la censure ne l’avait pas interdite. La carrière de « Sembilan Naga » est compromise avant même d’avoir commencé car aucun distributeur ne va prendre le risque d’affronter le LSF, la censure indonésienne (La chaîne Metro TV a quand même diffusé la bande-annonce avec la phrase incriminée). Dans une interview qu’il a donnée dans le Jakarta Post fin décembre, le très remarqué réalisateur de « Ada apa dengan cinta ? », succès énorme au box office indonésien en 2003, ne décolère pas et critique l’institution pour son conservatisme. « Cela montre que l’état ne souhaite pas laisser les gens décider par eux-mêmes », poursuit Rudi Soedjarwo qui préconise un système de cotation plutôt que « de laisser la censure couper les films ». Le journal anglophone affirme que cette affaire « place la censure d’état sous les projecteurs et renforce une nouvelle fois sa réputation ultraconservatrice et capricieuse ». L’institution comporte 45 membres recrutés au sein de neuf ministères, des autorités religieuses, de l’armée, de la police et même des services secrets…

Le Jakarta Post poursuit en rappelant que le LSF a l’habitude de couper le moindre baiser sur les lèvres mais s’étonne que ses critères semblent aléatoires. Ainsi d’autres films passent la censure, comme « Arisan » qui comprend une scène de baiser entre hommes, ou « Detik terakhir » qui montre une scène de masturbation et une autre de baiser lesbien. En outre, le quotidien ajoute que le LSF se conforme systématiquement aux injonctions « des groupes religieux, des membres du gouvernement ou de tout autre personne dans une position influente ». Le Jakarta Post rappelle que le film « Buruan cium gue » avait été retiré des écrans à la demande du prêcheur télévisuel Abdullah Gymnastiar car « il corrompait la jeunesse avec des désirs charnels ». Plus récemment, trois documentaires sur le Timor oriental ont été interdits à la diffusion lors du Festival du Film Indonésien à Jakarta car jugés « partisans et montraient les Indonésiens comme les mauvais », avait expliqué l’institution. Et le quotidien en anglais de noter de toute façon que les décisions du LSF ressemblent à un combat d’arrière-garde face à la disponibilité sans fin des DVD pirates et des accès à Internet…

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