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UN SUCCES NOMME AHOK

Née d’un père français, Cathy Sharon fut tour à tour mannequin, présentatrice, actrice et femme d’affaires. Elle a endossé le costume de coproductrice pour le film biographique « A man called Ahok » qui retrace le parcours de l’ancien gouverneur de Jakarta Basuki Tjahaja Purnama (dit Ahok), de ses jeunes années jusqu’à son élection à la tête du district de Belitung-Est en 2005. Avec ses 1,4 million de spectateurs (au 25 novembre), le film est un des succès indonésiens de l’année. Rencontre.

Bali-Gazette : Comment expliquez-vous le succès du film ?
Cathy Sharon : Nous ne nous attendions pas à un tel succès pour être honnête. Mais je pense que cela montre à quel point les gens ont du respect pour Ahok et combien il leur manque. C’est aussi un film familial qui retrace le parcours d’un homme de valeurs, de principes, de cœur et de talent et je pense que cette histoire parle aux gens et les touche directement.

B-G : Comment êtes-vous devenue impliquée dans le projet ?
CS : C’est très simple. Je faisais partie de l’équipe de campagne d’Ahok pour sa réélection en 2017. C’est à ce moment-là que j’ai rencontré Rudi Valinka, qui avait écrit le livre dont le film est inspiré. Et c’est à cette période qu’a germé l’idée. Et si on en faisait un film ?

B-G : Le film s’arrête sur l’élection de Ahok à Belitung-Est en 2005. Pourquoi ce choix de ne pas évoquer ses années à la tête de Jakarta et jusqu’à la campagne pour sa réélection en 2017 puis son emprisonnement pour blasphème ?
CS : Le film n’est pas un film politique, ni un film polémique. Il ne s’agissait pas de produire une glorification d’Ahok. Il s’agissait plutôt de montrer le parcours qui a construit la personnalité de cet homme, notamment l’influence importante de son père dans sa construction en tant qu’homme, les importantes valeurs familiales, ainsi qu’un portrait de l’Indonésie en filigrane. Tout se qui s’est passé depuis son élection en tant que vice-gouverneur, puis gouverneur et jusqu’à la campagne de 2017 est récent, très bien documenté. En revanche tout le cheminement qui explique pourquoi Ahok est Ahok, son éducation familiale à Belitung, tout cela est beaucoup moins connu et très intéressant pour les spectateurs. C’est pour cela que le réalisateur Putrama Tuta a fait ces choix. Il voulait aussi faire un film émouvant, qui provoque des réactions chez les spectateurs et je crois que c’est plutôt réussi de ce côté-là aussi.

B-G : Malgré le caractère apolitique du film, il a beaucoup été question d’une rivalité entre « A man called Ahok » et un autre film sorti au même moment, « Hanum & Rangga », produit et réalisé par des adversaires politiques d’Ahok et du président Jokowi. Qu’en pensez-vous ?
CS : Oui, les réseaux sociaux notamment se sont emparés du sujet et ont voulu opposer les deux films comme deux visions politiques et deux camps qui s’affrontent. Mais la vérité c’est qu’on parle de deux films qui n’ont rien à voir. « A man called Ahok » est un film familial et « Hanum & Rangga » est une histoire d’amour. Nous n’avons jamais cherché à opposer les deux. Bien au contraire. J’ai incité les gens à aller au cinéma, pas pour y voir un film en particulier mais parce que c’est important pour le développement du cinéma indonésien. Nous avons même proposé aux équipes de « Hanum & Rangga » que nous regardions nos films ensemble. Mais cet épisode montre effectivement que la société indonésienne est assez divisée actuellement.

B-G : Quelle a été l’implication de Ahok dans la conception du film ?
Et quelles ont été ses réactions ainsi que celles de sa famille au moment du visionnage ?
CS : Lui et ses équipes ont été très impliqués dans l’écriture du scenario.
On retrouve d’ailleurs un document sonore dans le film qui est original avec sa vraie voix. Le film lui a évidemment été montré et il en était très content.
Il espère que cela pourra servir d’exemple et d’inspiration à d’autres, notamment aux jeunes. Qu’avec de la volonté on peut arriver à faire bouger les choses. Sa famille a aussi été très émue, comme beaucoup de spectateurs je pense.

B-G : Ahok doit sortir de prison en janvier prochain. Savez-vous quels sont ses projets pour la suite ?
CS : Non, je ne suis au courant de rien mais je lui souhaite le meilleur quoi qu’il entreprenne. Il le mérite vraiment. Grace à lui je me suis découverte une conscience politique. Avant j’étais une citoyenne passive, non impliquée mais ce n’est plus le cas. Il m’a vraiment inspirée. Je ne souhaite pas faire de politique, ce n’est pas mon monde bien que les sollicitations ne manquent pas, mais je ferai partie des volontaires pendant la campagne qui débute actuellement. Je ne peux pas encore entrer dans les détails mais je souhaite jouer un rôle auprès des volontaires.

B-G : On sent beaucoup d’admiration pour la personne de Ahok dans vos propos. Qu’est-ce qui vous impressionne le plus chez lui ?
CS : Son obstination, sa persistance sans hésitation. Il est également quelqu’un de très drôle. Mais c’est son opiniâtreté qui force le respect. Je pensais comme beaucoup de gens que la politique en général, et en Indonésie en particulier, se résumait à la corruption et brassait de l’inutile. Mais il m’a convaincu qu’il était possible de faire avancer les choses dans le bon sens, d’avoir une vision positive et efficace de l’action publique. Ahok veut aider les gens, rendre son pays meilleur. C’est un homme authentiquement bon.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Chauvin

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