Accueil Billets Le billet de Didier Chekroun

Spéléologie

L’autre jour, un hypster newyorkais me demandait s’il y avait une scène underground à Bali. Déjà qu’en France, ce terme est un tube moins in qu’à London, alors en Indonésie ! Je décidais de creuser le sujet afin de satisfaire la curiosité souterraine de mon macadam cowboy. A première vue, l’ambiance ici est moins bitume que biture, voire que bite tout court selon les heures. Question rails et lignes, il y a bien l’usage des drogues qui, contrairement aux USA, est forcément underground vu les lois en vigueur. Comme je piochais un peu, je m’enfonçais d’avantage dans ma réflexion. Hormis les pantouflards qui s’enterrent chez eux, il y a des tentatives de vie troglodytique. Certains tentent d’implanter la deep house berlinoise, mais c’est donner du Nutella aux vaches.

Pour esquiver Nyepi, le Tout Bali était à Gili Air pour un festival teuton. Pas de bovins mais des moutons, tout le monde allait y être, c’était donc immanquable. Mais personne n’a retenu le nom du moindre
DJ ! Car niveau branchitude, Bali en est encore à l’ère néolithique. Ne mélangeons pas cavités tectoniques et boites techno. Il y a un gouffre entre l’Europe et l’océan Indien. Si cette contre-culture metrosexuelle rame pour s’implanter, c’est aussi parce que les locaux ont une fascination viscérale pour les selebriti. Il suffit de voir le succès de méga-shows du type Fat Boy Slim à Potato Head pour comprendre que les petits artistes qui montent, ici, ils ne percent pas la croute terrestre. Certains lieux comme Shelter tentent la niche. Mais vu l’accueil fade et l’addition salée, niveau station, c’est moins Victoria que Waterloo. On a considéré, à tort, que Jenja était le lieu le plus underground de l’île. Certes, c’est en sous-sol. Mais par définition, ze place to be ne peut être un lieu confidentiel. Lors des soirées « urbanized » (ou Hip-Hop grenadine), les MC hurlent des accords majeurs, pour mineurs, pourtant interdits en club. Ils viennent par wagonnets entiers. Bien en rang, deux par deux, mais ils sont peu étanches aux drinks à cet âge-là et vu leurs mines, ils ont dû s’en prendre une bonne !

J’en profite pour glisser une parenthèse : avez-vous remarqué cette mode des barbus à chemises à carreaux ? Avec cette note mi-bucheron, mi-mineur, nous touchons le fond. Plus une sortie à La Favela sans croiser de poilus. De capitaines Haddock pour le moins couillus à des Panoramix pour les hyper hype : je ne sais pas si Ginette aime les bisous qui piquent, mais Gilette a du souci à se faire. Est-ce parce que la patronne des mineurs est Sainte-Barbe ? Le plus amusant, c’est que ces jihadistes fashionista de la touffe sont entourés de Barb…ie. Si au Nord, c’était les corons, à Bali, les DJs vont au charbon ; les gueules noires de l’avant-garde. Et malgré les pannes d’électricité, il y a un mouvement alternatif qui se profile. Mais attention au coup de grisou. La soupe commerciale a du plomb dans l’aile. Plumes et goudron pour les pollueurs sonores. Recyclons la night.

Au bout du tunnel, je vis enfin la lumière : un peu de dynamite et « ¡ Viva la revolución ! »

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