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LE REMUE-MENINGE DU MONDIAL CCE A BALI

Les 5 et 6 octobre dernier, les Conseillers du Commerce extérieur de la France étaient réunis à Bali pour leur Mondial. Une première en Asie. L’occasion, au cours d’interventions, discussions et rencontres, de mettre l’accent sur la place croissante du continent dans l’économie mondiale. Et d’évaluer le rôle que la France peut y jouer…

C’est une institution de 120 ans qui reste une grande méconnue. Les Conseillers du Commerce extérieur (CCE) de la France sont pourtant un réseau de 4000 chefs d’entreprise et experts de l’international, présents dans toutes les régions françaises et dans plus de 140 pays étrangers. Leurs missions s’articulent autour du conseil aux pouvoirs publics, de la promotion de l’attractivité de la France, de l’appui aux entreprises et de la formation des jeunes à l’international. Ils sont ainsi une trentaine en Indonésie, où ils se réunissent mensuellement à l’Ambassade de France à Jakarta afin de faire remonter les informations de terrain vers le premier représentant de l’Etat français dans l’archipel.

Le choix de l’Asie, après Deauville en 2016 et Miami auparavant, n’était évidemment pas anodin. Le continent représente 60% de la population mondiale, 45% de son PIB et plus de 60% de la croissance internationale. Et l’Indonésie y occupe une place à part : plus grande économie de l’Asean, espace maritime majeur et carrefour de la région Asie-Pacifique.

Il a donc été question de l’Asie. Un continent loin d’être uniforme mais vers lequel le cœur de l’économie mondiale se déplace sans équivoque. Un continent ou le maritime tient une place prépondérante. Il y a évidemment la Mer de Chine méridionale, dont l’aspect géopolitique occupe la diplomatie mondiale avec des territoires inhabités mais riches en matières premières dont la Chine, les Philippines, le Vietnam ou la Malaisie revendiquent la propriété. Mais il y a aussi le détroit de Malacca, ce couloir maritime séparant Sumatra et la péninsule malaise. Un couloir emprunté par plus de 50 000 navires chaque année, ou passe 25% du commerce maritime mondial et où transite la moitié du commerce maritime de pétrole.

Réussir la révolution numérique
L’Indonésie et la France sont deux nations maritimes majeures. La France est à la tête de la deuxième plus grande zone exclusive maritime au monde. Le président indonésien Jokowi de son côté, a placé le développement maritime de l’Archipel comme une priorité de son mandat, ce qui passe par des investissements en infrastructures énormes. La France doit ainsi profiter de son expertise pour investir en Indonésie, comme l’a par exemple fait le groupe Louis-Dreyfus Armateurs avec son partenaire indonésien Sinarmas. Elle compte notamment sur le Cluster maritime français (CMF), le lobby maritime national regroupant tous les acteurs du secteur, pour s’y développer.

Les débats ont aussi beaucoup évoqué la révolution numérique actuelle. Si la « French Tech » existe et est internationalement reconnue, les entreprises traditionnelles françaises semblent plus en difficulté face à leur nécessaire évolution numérique et ont besoin d’être accompagnées dans cette « disruption numérique ». Le Medef l’a par exemple compris et a lancé une mission intitulée « Digital Disruption Lab » qui a permis d’aller observer ce qui se fait à l’étranger dans le domaine numérique afin d’en faire profiter les entreprises françaises.
L’Indonésie aussi vit une révolution de ce type. Trois de ses entreprises numériques (Go-Jek, Tokopedia et Traveloka) sont devenues des licornes, des entreprises évaluées à plus d’un milliard de dollars. Le géant chinois ne s’y est pas trompé et ses géants du secteur comme AliBaba ou Tencent investissent massivement dans ces entreprises. Mais l’Indonésie souhaiterait diversifier les sources de ces apports en capitaux et fait un appel du pied très clair à la France. Les investissements numériques dans des secteurs qui permettent d’améliorer la vie des Indonésiens (éducation, santé, agriculture, transports…) ont ainsi de grandes chances de succès.

Un nouveau coach pour cette équipe de France de l’export
Mais si l’Asie n’est pas un territoire uniforme, elle est dans son ensemble, pour la France, une sorte d’énigme culturelle. Ses trois mastodontes démographiques que sont la Chine, l’Inde et l’Indonésie ont, par exemple, cela en commun qu’il est difficile et long d’y faire du business. Etre accompagné par des institutions françaises peut dès lors être une aide précieuse.

On a beaucoup entendu parler au cours de ce Mondial des CCE de l’équipe de France de l’export. Une équipe de France qui quelquefois ressemble davantage à un maelstrom qu’a une véritable équipe. Entre les CCE, les Chambres de Commerce et d’Industrie françaises internationales, Business France, Bpifrance ou les missions économiques, il peut être difficile de s’y retrouver. Pascal Cagni l’a bien compris. Le tout nouveau président de Business France en est le premier dirigeant originaire de la société civile et du monde entrepreneurial. Pendant plus de douze ans, il a dirigé avec succès Apple en Europe/Afrique/Inde/Moyen-Orient. Il souhaite très clairement clarifier et optimiser les efforts de la France à l’export. Pourra-t-il devenir le coach qui semble parfois manquer à cette équipe de France de l’export ?

Car le commerce extérieur est un peu le talon d’Achille de l’économie française. Son déficit commercial s’est en effet alourdi de près de 8 milliards d’euros au cours du premier semestre, avoisinant les 34 milliards d’euros. La part de marché de la France dans les exportations mondiales est passée de 6,2% à 3,3% en 25 ans. L’Hexagone compte aussi deux fois moins d’entreprises exportatrices que l’Italie, et trois fois moins que l’Allemagne.

La mentalité française joue un rôle dans cet état de fait. La situation du pays aussi. La France est en effet un marché trop grand pour avoir l’obligation de penser international dès le début, à l’inverse des pays scandinaves ou de la Hollande par exemple ; et un pays trop petit pour s’y consacrer uniquement, contrairement aux Etats-Unis ou à l’Indonésie. Une situation d’entre deux qui a pu jouer.

Mais s’il est un fait récent qui a permis à l’image et à l’attraction de la France de bondir internationalement, c’est bien l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République. Thomas Lembong, ancien ministre indonésien du Commerce et aujourd’hui président de l’Organisation indonésienne de coordination des investissements (BKPM), l’a très clairement affirmé au Mondial des CCE. Conjugué à ses atouts historiques et à son expertise, cet évènement doit permettre à la France d’améliorer sa position économique à l’international.

Jean-Baptiste Chauvin

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