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Pédophilie ou héritage culturel ? L’impasse du multiculturalisme

Il y a une polémique dans la sphère culturelle indonésienne aujourd’hui : le
mariage d’un imam milliardaire de 43 ans, Syekh Puji, avec une jeune fille de 12 ans, Luthfiana Ulfa. Il est intéressant d’écouter tout le fracas entourant cette affaire, précisément parce que, objectivement et pour dire les chose naïvement, c’est un crime culturel sans victime quelle que soit la façon de l’aborder. Il ne s’agit pas de la tragique histoire ordinaire d’une
enfant vendue par ses parents, même si certaines sources affirment le contraire. Non, la couverture médiatique du cas Ulfa, cette victime supposée, montre la jeune fille clamer à qui veut l’entendre et avec sincérité qu’il ne s’agit d’aucune façon d’un mariage forcé, que les gens
ne devraient pas se donner la peine de s’inquiéter pour elle et démontre ainsi que la seule chose qui l’oppresse dans cette histoire, c’est en fait la couverture des médias. Ce flot ininterrompu de paparazzi et de journalistes qui essaient avec force de transformer cet événement sacré dans son existence en une sorte d’ultime crime comme l’humanité.

Les médias, avec l’appui de nombreuses personnalités publiques et d’experts  en psychologie enfantine pointent unanimement un doigt vengeur vers ce mariage, le condamnant au nom de la protection de l’enfance. Ces gesticulations sont bien sûr compréhensibles, la pédophilie n’a-t-elle pas été élevée au rang du crime le plus innommable dans le monde libéral  d’aujourd’hui ? Ce que nous devons comprendre tout d’abord, c’est que ça  n’a pas toujours été le cas. Est-il utile de rappeler que l’homosexualité fut une pratique aux retombées culturelles primordiales sous la forme de la pédérastie en Grèce par exemple ? Sur quelle base Syekh Puji et Luthfiana Ulfa font reposer leur acte marital ? Justement sur la base sacrée de leur religion, le prophète Mohamed, comme tout le monde le sait, a épousé Aisya quand elle avait six ans. Et là, nous entendons inévitablement les arguments tout faits des musulmans progressistes : que les temps ont changé, qu’il ne s’agit que d’un fait d’histoire, que tout un chacun ne peut être aussi sage que le prophète et faire comme lui, des arguments peu convaincants destinés
surtout à faire retomber la tension.

C’est là que nous nous trouvons en face de l’impasse du multiculturalisme. Le politiquement correct d’aujourd’hui ne nous demande-t-il pas de respecter les autres, tout spécialement les traditions, les cultures et les religions qui sont différentes des nôtres ? Mais aussi, en même temps, ne nous demande-t-il as toujours de protéger l’oppressé de l’oppresseur ? Dans ce cas très précis, Ulfa de Puji ? Ma i s s u r q u e l s critères nous basons-nous pour définir un champ d’oppression comme tel ? Une réponse libertaire à ce problème serait bien sûr de prendre des « décisions informelles ». C’est-à-dire les laisser choisir seuls ce qui est le mieux pour eux, après les avoir avertis de toutes les conséquences, ouvrant la porte à encore plus de “décisions informelles”.

Ce qui est naïf dans cette solution, c’est de croire qu’on pourrait informer les parties en question d’une façon neutre, sans les charger d’espoirs personnels et de jugements. Si cette façon neutre existait vraiment, ne
serait-il pas alors possible à ceux qui sont pour ce type d’union d’informer chaque petite fille que, sous la loi de l’islam, elle peut se retrouver mariée à 12 ans avec telle et telle conséquences ?

Mon propos ici n’est pas, bien entendu, de défendre les mariés contre l’oppression des médias et d’affirmer qu’ils sont dans leur droit. Mon propos est en fait beaucoup plus pessimiste. Nous devons admettre que nous avons rencontré la pierre d’achoppement de notre sphère culturelle. Et il n’y a pas de véritables façons de s’en sortir. Notre attitude moralement
perturbée par ce mariage avec une pré-pubère est aussi imparfaite que
l’attitude de ceux qui s’en accommodent. Notre position « protectrice » est en elle-même déjà violente, comme nous l’a suggéré la petite Ulfa, le sujet même par lequel nous pouvons mesurer notre violence. Bien plus que son mari, c’est peut-être nous qui l’oppressons le plus avec cette polémique. Ce que nous devons cerner donc, c’est tout d’abord cette pierre d’achoppement, les limites de notre politiquement correct. En fait, ce n’est pas parce que nous sommes trop loin des autres qu’il est difficile de les comprendre et de les informer suffisamment, mais plutôt parce que nous sommes si irrationnellement proches qu’on les informe de trop.

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