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NYOMAN BRATAYASA, MADE BAYAK, MADE BUDIARTHA, BLACKBEACH, FFI ET JEAN COUTEAU

<Jusqu’au 7 décembre>
Nouvelle exposition pour le jeune artiste Nyoman Bratayasa
Nyoman Bratayasa, originaire d’Ubud, expose du 11 octobre au 7 décembre une série de toiles personnelles dont le thème s’intitule « The Soul of Nature ». Né en 1980, ce peintre autodidacte vit et peint depuis toujours à Lodtunduh, un quartier de la ville des arts à Bali. Il s’orienta d’abord vers l’économie et la gestion d’entreprise à Denpasar avant de s’adonner vraiment à la peinture abstraite. Exposé à Jakarta, Banyuwangi, Yogyakarta ou encore Solo, Sanur n’est donc pas sa première exposition. Son obsession reste l’interprétation des couleurs, chacune possède une signification particulière. Le blanc par exemple représente la pureté, le noir est associé à la contamination ou encore l’or au succès. Selon lui, l’équilibre d’une vie parfaite peut être trouvé dans les couleurs…
« The Soul of Nature » au Maya Sanur Resort & Spa, Jl. Danau Tamblingan, Sanur. Ouvert tous les jours de 8h00 à 20h00, www.mayaresorts.com

<Jusqu’au 17 novembre 2017>
Le grand Made Bayak sur ses terres, à Bali
Encore de la peinture ce mois-ci avec une autre exposition, intitulée « Bali Cosmology », au Salon Casa Luna d’Ubud. C’est le célèbre artiste balinais engagé, Made Bayak qui expose. Il est connu pour sa volonté à dénoncer les pratiques non-environnementales et fait la guerre au plastique avec une détermination sans faille. Bien au-delà de l’Indonésie, l’artiste a déjà exposé son travail en Allemagne et en Pologne. Il fût également finaliste du prestigieux prix de Singapour, le « Sovereign Art », en 2013. « Bali Cosmology » est une exposition familiale puisque sa femme ainsi que son fils y participent. La thématique met l’accent sur l’influence des parents en tant que modèles positifs. Il insistera également sur les rôles sociaux-politiques et culturels parfois insoupçonnés des femmes balinaises. « Bali Cosmology » nous mène au cœur de cette culture en utilisant l’art comme outil d’éducation holistique et la sagesse comme outil de stimulation de la créativité et de l’imagination chez la jeunesse.
« Bali Cosmology » au Salon Casa Luna d’Ubud, Jl. Raya Ubud. Tèl. (0361) 97 16 05, www.casalunabali.com

<Du 1er au 30 novembre>
Réalisme photographique ou hyperréalisme pictural de Made Budiartha
Made Budiartha propose une vision saisissante de la société balinaise. Des instantanés photographiques qu’il transforme en œuvres peintes. Depuis 2003, Made Budiartha cultive cet art particulier, partant d’une photo, il fixe pour l’éternité, par la peinture numérique, ce moment de vérité qu’a su capturer sa caméra. L’effet est impressionnant, regarder avec attention le visage des Balinais est comme pénétrer dans leurs pensées, leur moi intime. Made Budiartha a su développer une relation confiante avec les membres de sa communauté, au point que ceux-ci s’abandonnent sans restriction à l’indiscrétion de sa caméra. Il a su porter un regard affectueux et discret sur la vie de ses contemporains, mettant en valeur l’âme balinaise. L’esprit de solidarité des Balinais n’est pas un vain mot. Made Budiartha en est un bel exemple, ayant choisi de verser 20% du montant des ventes de ses oeuvres exposées à Paradiso Ubud à des institutions charitables aidant les enfants défavorisés de Bali. Paradiso Ubud continue, avec l’œuvre de Made Budiartha, son exploration de la culture balinaise, dans un même temps si proche et si lointaine.
Paradiso Ubud, Jl. Gootama Selatan, Ubud, Tél. 085 737 614 050

<Le 11 novembre>
Le Festival du Film Indonésien se déplace à Manado !
Passons maintenant au cinéma. Après la Balinale et le Festival du Film de Denpasar le mois dernier, ce mois-ci se tiendra un autre festival qui célèbre l’Indonésie, le FFI (Festival Film Indonesia). Cette année, ce ne sera pas Jakarta qui aura l’honneur de l’accueillir mais Manado, sur l’île de Sulawesi, le 11 novembre. Et cette nouvelle édition promet du changement puisque selon Riri Riza, directeur du FFI et président du jury, pour pouvoir y participer il faudra que les films sortis entre le 1er octobre 2016 et le 30 septembre dernier aient été projetés en salle. Ce n’est pas tout, le festival bénéficie d’un nouveau système de verdict. Il implique des associations cinématographiques locales qui auront l’opportunité d’approuver ou non les nominés. Le jury a également été choisi sur la base des recommandations de ces associations. Les catégories ont aussi été modifiées, avec notamment l’ajout d’une catégorie « Meilleur maquillage » ! Enfin les deux têtes d’affiches de ce festival sont « Kartini » de Hanung Bramantyo et « Pengabdi Setan » (Les adeptes de Satan) de Joko Anwar. Nominés 13 fois sur les 22 catégories, dont celle de meilleur film et celle de meilleur réalisateur, ils seront durs à départager.
Que le meilleur gagne !
Festival Film Indonesia, à Manado, Sulawesi,
www.festivalfilm.id, tél. (021) 79 18 15 24, [email protected]

De l’amour à l’italienne et de l’immigration à la française au restaurant Blackbeach
Comme le mois dernier, l’italien et le français sont mis à l’honneur ce mois-ci. Les jeudis français alterneront entre drames et comédies, les mercredis italiens auront pour thème l’Amour et les questionnements qui en découlent. Retrouvez « Blame Freud », le mercredi 1er novembre où Francesco le psychanalyste tentera de ne pas confondre patientes et sœurs et essayera de les aider au mieux. Mercredi, partez pour Paris avec « Alaska », au cœur d’une histoire d’amour compliquée autour de la recherche du bonheur. Mercredi 15, allez voir « Let’s talk », puis le mercredi 22 « A possible life » vous emmènera sur le thème sensible de la reconstruction d’une femme battue. Enfin, le mercredi 29 novembre, « God Willing » mettra en lumière les problèmes liés à la foi et à la religion.
Les jeudis, retrouvez un thème tout aussi compliqué à appréhender, celui de l’immigration. Jeudi 2 novembre, avec le film d’Alain Corneau, « Stupeur et tremblement » tiré du roman d’Amélie Nothomb sur l’intégration à la société japonaise. Jeudi 9 novembre, « Samba » sera à l’affiche, Omar Sy, un Sénégalais, tentera d’obtenir ses papiers français. Le jeudi 16, une jeune Libanaise qui arrive à Paris fera face au problème de la vie étudiante des banlieues dans « Peur de rien », enfin jeudi 23 et jeudi 29, retrouvez respectivement « Nous trois ou rien » puis « Bienvenu à Marly-Gomont », des comédies dramatiques récentes.
BlackBeach, Jl. Hanoman n°5n Ubud. Tél. (0361) 97 13 53. A partir de 20h, tous les mercredis et jeudis. Entrée gratuite

JEAN COUTEAU :
JE SUIS DEVENU UN ECRIVAIN INDONESIEN ET CONSIDERE COMME TEL

Jean Couteau est un intellectuel français dont le travail intimement lié à l’Indonésie couvre plus de quatre décennies de l’existence de cette jeune nation. Egalement contributeur occasionnel de la Gazette de Bali, auprès de qui la rédaction a toujours cherché un éclairage et des conseils sur la culture de Bali, Jean Couteau sort deux ouvrages en ce mois de novembre. Deux livres recueils d’articles et histoires courtes originellement publiés dans des titres de presse locaux (Kompas et Bali Now), l’un en indonésien, l’autre en anglais, dans ce format concis qui a fait sa réputation littéraire. Une réputation indonésienne avant tout car, ne nous y trompons pas, Jean Couteau fait partie de l’intelligentsia locale.
En effet, il n’écrit pas de l’extérieur comme un observateur étranger le ferait, après tout ce temps passé ici, ce Nantais d’origine
(cf. La Gazette de Bali n°6 – novembre 2005) fait désormais partie du paysage culturel de l’Archipel…

Jean Couteau, vous venez de sortir deux livres simultanément, chez des éditeurs différents, dans des langues différentes. Pouvez-vous nous les présenter ?
Le premier livre est une collection d’articles déjà publiés dans la page culturelle hebdomadaire du grand journal indonésien Kompas. Je partage cette page avec deux autres écrivains : Bre Redana, également ancien rédacteur de Kompas, et Seno Aji Gumira qui s’est fait une réputation en écrivant une histoire courte sur les massacres de Timor. Le second, en anglais, est un recueil de mes chroniques sur Bali publiées dans Bali Now.

Vous avez une longue expérience d’ethnosociologue, d’écrivain, de billettiste, de traducteur, en Indonésie. Selon vous, à quoi devez-vous cette extraordinaire carrière dans cet archipel si lointain qui a si peu de liens avec la France ?
Je suis d’abord venu comme coopérant au début des années 1970. Puis je suis revenu en 1975-76 avec ma mère, le peintre Geneviève Couteau ; elle prenait notes, faisait des dessins alors que je m’intéressais au phénomène de la peinture balinaise. Lorsqu’elle est partie, je suis resté. Ma carrière indonésienne est due au fait que j’ai très vite cessé d’être intéressé uniquement par la « différence ». J’ai appris l’indonésien et j’ai cherché très rapidement la compagnie des intellectuels indonésiens. Le philosophe et compositeur Usadi Wiratnaya, qui écrivait les éditoriaux du Bali Post, est devenu mon mentor. Nous avons créé une revue, Archipelago, qui a capoté suite à la première guerre du Golfe en 1990 ; ensuite j’ai pris en main avec lui la page en langue anglaise du Bali Post que j’ai transformée en chronique culturelle et sociale, avec un extraordinaire dessinateur de presse, Wayan Sadha. Cette page, qui avait un gros succès, a été fermée suite à menaces et interventions du gouvernement lorsque nous avons publié un article sur « Les batara de la Mecque » batara voulant dire à la fois dieux et ancêtres… J’avais signé sous un faux nom et je n’ai pas été inquiété. Mais des intellectuels de Jakarta avaient entendu parler de mon « English Corner » et m’ont offert d’écrire dans la presse nationale. De fil en aiguille, j’ai fait des livres d’art (dont d’artistes très connus : Affandi, Walter Spies, Srihadi, Lempad etc.) J’ai commencé à écrire en indonésien des articles et histoires courtes. Je suis devenu de ce fait un phénomène, jusqu’au jour où Kompas est venu me demander de devenir chroniqueur libre. Mes chroniques vont de l’histoire très courte, à la réflexion sociale… Je suis maintenant devenu un écrivain indonésien et considéré comme tel : congrès de la langue indonésienne, discussions, invitations multiples, etc.

Vous écrivez des chroniques dans la presse indonésienne depuis les années 80. A quelle forme de censure ou d’autocensure devez-vous vous plier ?
En Indonésie, il y a deux tabous : la nation, ne pas questionner l’unité nationale ; et la religion : ne pas s’affirmer agnostique. On peut parler de Marx – je le fais encore cette semaine – mais pas de communisme. A l’intérieur de ce système, on est libre. Libre d’attaquer des personnes ; ainsi j’ai attaqué l’ex-président du PKS nommément en disant qu’il vivait à la colle, puisque sa deuxième femme était européenne, et l’Union européenne ne reconnait pas la polygamie. C’était cinglant.

Comment cette censure a-t-elle évolué avec le temps ?
Maintenant, on peut attaquer librement le gouvernement. Mais il y a une censure morale. Lorsque, parlant de Charlie Hebdo, j’ai mentionné que Hollande avait eu droit à une caricature lui montrant la quéquette, on a coupé ce dernier mot.

Avez-vous plus de liberté lorsque vous écrivez en anglais ?
Oui, ainsi j’ai voulu écrire un jour un article dans lequel je disais que le corps de la femme indonésienne était un champ de compétition culturelle, entre un fessier très Western (pantalon collant) et une tête très arabisée, l’article a été refusé. J’ai toutefois pu en faire une version anglaise. Je dois dire que c’était beaucoup plus drôle que dit comme ça.

Vous fréquentez l’intelligentsia balinaise depuis longtemps, quelle perception a-t-elle de la France et de la culture française ?
Le peuple ne connait rien. Les grands intellectuels sont tous fous de la culture française ; ses arts, sa pensée : Derrida, Bourdieu, Foucault et même Levinas sont mentions obligées pour toute thèse qui se respecte, même si…

Vous préparez une exposition des toiles de votre mère je crois ? Quels sont vos projets ?
L’exposition aura lieu du 24 janvier au 12 février à la National Gallery, avec un séminaire sur le sujet « Orientalisme et problématique de l’appropriation culturelle ». Ces deux évènements sont organisés avec le soutien de l’Ambassade de France. J’ai un devoir envers ma mère qui a fait une œuvre importante sur l’Indonésie et le Laos, malheureusement interrompue trop tôt par le Parkinson. Mes projets : écrire davantage d’histoires courtes, ce qui est mon point fort. Me retirer le moment venu dans la montagne magique.

Interview par Eric Buvelot

« Kolom Udar Rasa Jean Couteau, Indonesiaku », éd. Kompas, 208 pages, 60 000rp. « Myth, Magic and Mystery in Bali », Jean Couteau, éd. Phoenix Communications, 120 pages, 200 000rp

 

 

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