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Nous sommes tous des juifs indonésiens

Si on peut s’inquiéter de plus en plus de la montée de l’intolérance dans ce pays qui s’est fait une renommée internationale de son pluralisme religieux, notamment à cause des exactions régulières des islamistes et de la gangrène du terrorisme affilié à Al Qaida, il est réconfortant d’apprendre qu’à Manado, au nord de Célèbes, le judaïsme se porte bien… Oui, vous avez bien lu, il y a des juifs à Manado. D’ailleurs, si vous en doutez, allez donc faire un tour là-bas, dès l’aéroport, le pos ojek pavoise fièrement ribambelle de drapeaux israéliens et il vous suffira de lever la tête en direction des collines pour voir le plus grand chandelier à sept branches du monde, un menora de 20 m, dominer la région. Lue dans un article du New York Times, cette enquête sur les juifs de Manado en surprendra plus d’un, tout est donc possible ici et il faut garder foi en ce modèle indonésien de tolérance, si important régionalement, mais aussi pour le reste du monde.

Certes, nous connaissions déjà la synagogue de Surabaya, érigée il y a une centaine d’années par des juifs d’Irak et fréquentée ensuite par les colons hollandais, mais elle a malheureusement été fermée en 2009 sous la pression des islamistes, à cause des regains de tension à Gaza. Mais là, nous apprenons dans le quotidien Newyorkais que cette communauté juive est récente et prospère, même si réduite. « Nous essayons simplement d’être de bons juifs, explique Yaakov Baruch, 27 ans. Mais si vous nous comparez aux juifs de Jérusalem ou de Brooklyn, on n’y est pas encore. » La synagogue a été bâtie il y a six ans dans un bourg en dehors de Manado, fondée par des Indonésiens qui souhaitent apprendre le judaïsme et qui ne sont pour l’instant qu’une poignée. Ils ont d’ailleurs imprimé leur Torah sur l’Internet faute d’édition locale.

A Manado, les familles juives hollandaises vivaient leur culte en toute liberté jusqu’à l’indépendance officielle du pays en 1949, apprend-on. Leurs descendants se sont ensuite convertis peu à peu à la chrétienté ou à l’islam pour des raisons évidentes de discrétion. Ce n’est seulement qu’aujourd’hui qu’ils se tournent à nouveau vers la foi de leurs ancêtres. « Nous avions dit à nos enfants de ne jamais parler de leurs origines juives. Certains de nos petits enfants ne le savent même pas », explique Leo van Beugen, 70 ans, officiellement catholique. Le sentiment anti-juif n’a cependant jamais été bien fort en Indonésie. Historiquement, c’est seulement au tournant des années 80-90 qu’il s’est développé, explique l’universitaire australien Anthony Reid, dans les pages du quotidien américain.

Certes, le judaïsme ne fait pas partie des religions « autorisées » du pays, et n’est sans doute pas prêt de le devenir, n’en déplaise au défunt président Gus Dur, figure musulmane atypique et… militant de l’ouverture avec Israël. Apprécions enfin à sa juste valeur et avec un grand étonnement le fait que la récente rénovation de la synagogue, qui comprend la peinture d’une étoile de David au plafond, et l’érection du menora ont été payées par le gouvernement local (Pemda). La responsable de l’Office du Tourisme local espère d’ailleurs que cela attirera « touristes et hommes d’affaires d’Europe et d’ailleurs. » Indonésie, si tu n’existais pas…

Mieux que Wikileaks, Indoleaks…

Petit frère du site de Julian Assange, [www.indoleaks.org ->www.indoleaks.org ] révèle depuis quelques semaines des documents confidentiels indonésiens. En vrac, l’affaire Munir, le désastre Lapindo, des conversations de Suharto avec Nixon ou Gerald Ford, des deals avec Microsoft ou encore les événements de 1965. Nombre d’experts, de journalistes et de politiciens ont défilé à la télévision pour minimiser l’impact de ces révélations affirmant tous en chœur être déjà au courant. Mais alors, si tout le monde le sait, pourquoi privilégier encore les versions officielles ? Dans le cas du « coup d’état communiste » de 1965 par exemple, dénoncé par Indoleaks, pourquoi s’en tenir encore à la version abracadabrante de Suharto plutôt que de rétablir la vérité historique, notamment dans les livres d’école ? Il est vrai que dans un pays de traditions anticolonialiste, non-alignée et anti-impérialiste, même douze ans après la chute du dictateur, il est difficile d’admettre n’avoir été qu’un pion de la CIA pendant la Guerre Froide…

Dewi Persik à moitié nue (encore !), le FPI porte plainte

La chanteuse et actrice Dewi Persik, connue pour son tempérament de feu, son franc-parler et les divers scandales qui agrémentent sa carrière tumultueuse, à la grande joie des magazines de gossips, vient encore de faire parler d’elle. Le compositeur et producteur de chansons Ahmad Dani a mis des photos de Dewi à moitié nue, paraît-il prises à l’occasion d’une fête anniversaire, sur son Twitter. Cela n’a pas échappé à l’équipe de cyber-enquêteurs du Front des Défenseurs de l’Islam (FPI) qui traquent le porno « made in Indonesia » sur l’Internet. Habib Salim Alatas, chef de la section Jakarta de ce groupe d’activistes musulmans, connu pour ses razzias musclées qui restent généralement impunies, a donc déposé une plainte au commissariat au nom de son organisation. « En plus du rapport de police, nous allons aussi nous présenter chez elle afin d’obtenir une clarification », a-t-il expliqué, avec la façon docte qui le caractérise, dans le Jawa Pos. « Nous avons déposé une plainte à cause de ces photos qui ne sont pas correctes et qui constituent une infraction de la loi sur la pornographie », a-t-il ajouté, se présentant en bon citoyen respectueux du droit. Connus pour leur obédience inconditionnelle aux préceptes de l’islam, qu’ils privilégient à la loi indonésienne même s’ils s’en défendent généralement devant une caméra, les agités du FPI n’ont rien à craindre puisqu’ils ont maintenant la législation de leur côté. Ils peuvent remercier le gouvernement SBY et sa coalition de petits partis musulmans qui ont poussé et obtenu la révision de la législation sur la pornographie en 2008, enfermant la liberté sexuelle de chacun dans un carcan au contour islamique qui se resserre de jour en jour.

Notons que ce sont eux qui ont obtenu la réouverture du procès du rédac chef de Playboy et sa condamnation à deux ans de prison. Ce sont aussi eux qui manifestent bruyamment devant la cour qui juge le chanteur Ariel, inculpé pour une vidéo porno privée. Ce sont eux encore qui ont dispersé violemment un séminaire de transsexuels à Surabaya il y a quelques mois. Avec son équipe de cyber-enquêteurs, c’est donc le FPI qui veille aujourd’hui au respect de cette loi. Bien que les législateurs se défendent d’avoir pris parti, ce texte, même s’il laisse place à certaines exceptions culturelles propre à d’autres confessions, est loin de respecter le pluralisme inscrit dans la constitution. A titre indicatif, pas moins de 28 journaux ou magazines ont été la cible d’une plainte pour infraction déposée par le FPI en 2010. Contrairement à ce qui les caractérisait précédemment, sur ce dossier au moins, les membres de cette organisation violente sont désormais devenus de fervents légalistes.

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