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LE LIMAGE DES DENTS

Il est difficile de réduire le rituel du limage des dents à quelques lignes tant cette pratique a de l’importance à Bali. Le limage des dents est un passage obligatoire dans la vie d’un Balinais ou d’une Balinaise. Il donne lieu à de fastes cérémonies. Cette cérémonie est appelée matatah, du mot natah qui signifie tailler, sculpter en balinais. On peut également l’appeler masangih, de sangih (limer). En bahasa indonesia on parlera de potong gigi (couper les dents).

Le limage des dents, au même titre que les rites prénatals, les cérémonies à la naissance, les cérémonies pour jeunes bébés et le mariage, est un des rituels connus sous le nom de Manusa Yadnya. Le Manusa Yadnya est lui-même un des éléments du Panca Yadna (les cinq rituels) que tout Balinais hindouiste doit avoir effectué pour assurer la transition de son esprit de la naissance jusqu’à la mort et plus tard la réincarnation (voir tableau plus bas). La plupart des balinais pratiquent le limage des dents entre 6 et 18 ans, avant le mariage. La cérémonie est organisée à une date propice du calendrier balinais. Aucune économie n’est épargnée pour rendre cette cérémonie aussi belle que festive. Aussi, étant donné son coût, il n’est pas rare qu’elle soit collective, réunissant jeunes hommes et jeunes filles d’une même famille, frères et sœurs, cousins et cousines. La famille accueille alors de nombreux invités, loge les lointains visiteurs, engage des musiciens. La maison est soigneusement décorée. La journée est rythmée au son du gamelan qui accompagne le théâtre d’ombre. La famille et tous les convives sont habillés de leurs plus beaux habits traditionnels. Les offrandes sont partout. La fête est colorée, animée et joyeuse. Le rituel peut commencer.

La personne qui lime les dents est appelée sangging, qui désigne également un peintre et un artiste. Selon la tradition, le sangging doit appartenir à la caste des Brahmanes. Aujourd’hui, les Sudra (4e caste) font appel le plus souvent à des balian (les shamans de la 4e caste) pour présider la cérémonie. Le sangging commence par citer chaque candidat au limage des dents et les bénit avec un mantra ainsi que de l’eau bénite. Puis il « tue » les dents, où se nichent les six ennemis de l’homme. Il tape sur les dents supérieures avec une petite baguette en métal, appelée peet et récite un mantra à forte puissance magique. Le candidat se tient au bout du lit, reçoit une prière et s’asperge lui-même de l’essence des offrandes. Il enlève ses sandales, monte sur le lit et reçoit encore de l’eau bénite et un mantra. Puis il s’allonge sur le lit et est couvert d’habits décorés. Parents et proches se tiennent près de lui pour chasser les démons. Toutes ces précautions sont prises car le limage des dents est un moment de faiblesse où les ennemis peuvent attaquer. Celui qui se fait limer les dents a besoin d’aide et de protection. Il doit recevoir le soutien de tous ses proches. Une fois le candidat allongé, le sangging procède au limage. Il place un morceau de canne à sucre dans la bouche du patient pour maintenir ses mâchoires ouvertes. Puis il prend sa petite lime, kikir, et commence le travail. Seules les deux canines de la mâchoire supérieure et les quatre incisives situées entre elles sont limées, soit six dents, une pour chaque ripu, les ennemis, comme nous le verrons par la suite. La proportion des dents limées dépend du souhait de chacun. Le geste est avant tout symbolique et peut consister en de rapides coups de lime. Une fois terminé, le garçon ou la fille crache la salive contenant les limailles dans une noix de coco. Enfin le sangging redonne vie aux dents par un nouveau mantra. La poudre de dents est ensuite enterrée près du plus important lieu saint du temple familial pour s’assurer que son pouvoir sera toujours proche de l’individu.

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