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Pollution plastique : laissez-vous guider pour le ramassage

La Gazette de Bali : Pourquoi cette journée de ramassage des déchets à Tamblingan ?

Les guides francophones de Bali : Nous avons réagi par rapport à nos clients qui se plaignent. De cette façon, nous essayons de provoquer le gouvernement local pour qu’il se penche sur cette problématique. Et puis, depuis 4-5 ans, nous avons remarqué que nos clients se plaignaient de plus en plus des déchets. Bref, ça râle. Même si nous savons que les Français râlent tout le temps. (Rires).

LGdB : Ce n’est pas votre première fois n’est-ce pas ?

LgfdB : Non, l’an passé, nous avions organisé une journée de ce type à Tenganan (Karangasem), également avec les écoliers, les villageois et quelques officiels.

LGdB : Vous bénéficiez donc de l’aide du gouvernement local ?

LgfdB : Oui, nous avons contacté le département qui s’occupe du nettoyage pour obtenir un camion. Il faut dire qu’ils sont très coopératifs. Et une sono aussi, car nous accompagnons notre action de ramassage d’une séance d’information grâce à l’aide d’une association qui s’occupe de l’environnement ici (Pemuda Peduli Lingkungan Bali). Ils envoient des clowns traditionnels qui font un spectacle informatif sur la dégradation de l’environnement par les déchets. Les enfants adorent ça et le message passe mieux comme ça.

LGdB : Vous faites un peu le travail du gouvernement en somme ?

LgfdB : Oui, on peut dire ça. A Buleleng par exemple, qui a mis en place le programme ambitieux « Buleleng sans plastique en 2015 », on a toutefois refusé d’organiser le nettoyage de la plage de Lovina car on considère que c’est leur job et leur engagement.

<img4393|left>LGdB : Comment choisissez-vous le site de l’opération alors ?

LgfdB : Entre nous, nous proposons des sites. Nous avions pensé à Jatiluwih, Batukaru, Besakih… cette fois, nous avons finalement opté pour le lac Tamblingan. Nous allons essayer de faire ça deux fois par an. Nous ne pouvons organiser de telles opérations que pendant la basse saison car nous avons du temps libre.

LGdB : Vous financez vous-mêmes ces opérations ?

LgfdB : Eh oui… Heureusement, les agences de voyage nous aident car notre action est bien évidemment populaire auprès d’elles. Par exemple, à Tambligan, nous avons offert des petits cadeaux aux 120 écoliers présents. On a également fourni les moyens de transport.

LGdB : Sur place, comment ça s’est déroulé ?

LgfdB : Très bien. Les enfants sont enthousiastes, les villageois intéressés. Les enfants étaient 120. De toute façon, ils sont toujours partants pour ce genre d’activité qui s’inscrit dans leur programme extrascolaire. Il y avait des guides locaux – ceux de Munduk – venus donner un coup de main et s’informer. Et même des étudiants de Singaraja. Les clowns du PPLB ont fait leur spectacle de sensibilisation devant un public captivé. Nous étions 108 guides francophones présents pour l’événement. Bref, un vrai succès, très encourageant.

<img4394|right>LGdB : Beaucoup d’ordures ramassées ?

LgfdB : Un plein camion. L’an dernier, à Tenganan, nous avions lancé l’opération « 2000 rp par kg de plastique » le jour du ramassage, avec l’accord du gouvernement local. Les gens se sont bien sûrs mobilisés mais après quelques mois, le gouvernement a cessé de racheter les déchets et l’élan en faveur de l’environnement s’est brisé… C’est un problème de bureaucratie comme toujours ! Nous avons reproposé l’idée pour la journée d’action à Tamblingan mais les officiels ne voulaient pas s’engager.

LGdB : Vous avez le soutien des médias ?

LgfdB : Non, non, pas du tout… Enfin, à part la Gazette de Bali. Au début, nous les avons contacté bien sûr mais ils nous demandaient 4 à 5 millions pour se déplacer et couvrir l’événement, alors nous avons laissé tomber. C’est sûr, qu’en théorie, ils devraient être présents car les déchets, c’est la responsabilité de tout le monde. Aujourd’hui, nous ne les appelons même plus. Et puis, de toute façon, à notre époque, il y a FaceBook.

LGdB : Comment évaluez-vous l’impact de votre action ? Recevez-vous des critiques ?

LgfdB : C’est mieux que de ne rien faire même si la dimension de notre action reste modeste en regard du problème. Nous sommes conscients de cela. Et puis, à Tambligan, on nous a reproché de ne pas avoir distribué les repas dans des emballages biodégradables comme la feuille de bananier par exemple. Ainsi que des verres en plastique… Toutefois, toutes les personnes présentes ont consciencieusement déposé leurs déchets dans les poubelles, preuve que le message de cette journée d’action était bien passé.

LGdB : Vous, les guides francophones, êtes les seuls sur ce terrain ?

LgfdB : Pour la journée de ramassage à Tamblingan, nous avions invité tous les guides de HPI-Bali. Seuls une dizaine de germanophones sont venus. Sinon, les guides anglophones ont également organisé des journées de ramassage, mais après nous et notre première initiative à Tenganan l’an passé.

LGdB : En tant que guides, vous êtes aux premières loges pour évaluer cette pollution à Bali. Quels sont les sites les plus touchés ?

LgfdB : Eh bien, sans parler du sud de l’île dont la situation est catastrophique à cause de l’urbanisation, nous dirons que la situation est préoccupante à Lovina, sur la route côtière d’Amed, autour du temple de Besakih, dans la région de Keliki où la mise en place de poubelles ne semble pas avoir été une mesure suffisante. A Bukit, ça va encore, à part peut-être à Padang Padang.

<img4395|left>LGdB : Selon vous, quelles sont les solutions à ce problème chronique de l’Indonésie ?

LgfdB : A Bali, il faudrait une usine de recyclage. La plus proche est à Surabaya. L’Indonésie est un grand pays mais il n’y a peut-être qu’un à deux pour cent de la population qui soit conscient de cette pollution. Nous espérons que cela va s’arranger mais cela prend du temps et le temps ne joue pas en notre faveur. Les Indonésiens sont un peuple difficile à gouverner. Et puis, il y a aussi ce problème des mini-doses, tous ces emballages en plastique pour une petite économie qui perdure malgré le développement économique du pays. Enfin, l’autre problème que nous avons, c’est que nous devrions faire nos courses avec un sac à provision plutôt que de compter sur les sacs plastiques du commerçant.

LGdB : Mais vous, vous n’avez pas une petite idée de ce qu’il faudrait faire ?

LgfdB : Nous restons sur notre idée de « 2000 rp pour un kg de plastique ». Si le gouvernement lançait cette méthode, il pourrait ensuite envoyer les déchets à l’usine de retraitement de Surabaya. Nos leaders ont quelquefois de bonnes idées mais elles ont du mal à aller jusqu’en bas, jusqu’au stade de la mise en place… Elles se perdent en route…

LGdB : Comment cela se fait-il que les questions de pollution par les ordures soient aussi peu présentes dans les élections ? Et dans les préoccupations de la population ?

LgfdB : Oui, c’est vrai, cela apparait rarement dans les thèmes de campagne. Ou alors, ce ne sont que des promesses de politiciens, qu’ils oublient vite une fois élus… Au niveau des villages par exemple, ici à Bali, les femmes qui sont regroupées dans le cadre associatif du PKK (Pemberdayaan dan Kesejahteraan Keluarga) font régulièrement des ramassages des ordures dans les villages mais à la fin, qu’est-ce qu’elles en font ? Eh bien, elles les brûlent… Le niveau de sensibilisation aux problèmes des ordures est très bas. Les vieux paysans qui ont connu un Bali sans plastique ne s’émeuvent guère de la situation aujourd’hui. Quand leurs rizières sont envahies de déchets, ils les mettent dans celles du voisin !

LGdB : Vous n’avez jamais bénéficié de soutien politique pour votre action ?

LgfdB : Nous avons rencontré le gouverneur de Bali Made Mangku Pastika. C’était avant notre première journée de ramassage. Il nous a dit « Très bien » et nous a donné 75 goûters pour les enfants dans un emballage en papier. Nous ne croyons plus à la bureaucratie, nous laissons tomber. Une fois élus, les politiciens ne s’intéressent plus aux gens. Nous, nous allons continuer de travailler sur le terrain avec les gens.

<img4396|right>LGdB : A votre avis, pourquoi les Français aiment autant Bali ?

LgfdB : Les Français, ce qu’ils aiment ici, c’est la tradition préservée, encore visible, présente. Et puis, ils sont plus curieux que les autres, c’est pour ça que nous les appelons des voyageurs et non pas des touristes.

LGdB : Un message à nos lecteurs, dont beaucoup d’entre eux sont justement des « voyageurs » qui rêvent de Bali ?

<img4386|right>LgfdB : Venez nombreux mais de façon mieux répartie dans le temps de façon à ce que nous ayons du travail tout au long de l’année. (Rires). Non, plus sérieusement, il y a plus de 100 000 touristes français qui viennent à Bali tous les ans et ça augmente sans faillir ! En 2013, notre profession s’est d’ailleurs agrandie de 13 nouveaux membres. Alors, notre conseil est le suivant : prenez toujours un guide officiel !

Interview par Eric Buvelot et Socrate Georgiades

FB : guides francophones de Bali

Les guides francophones de Bali qui ont participé à cet entretien sont : Gede Suardana, Nyoman Suarma, Made Sukerta, Wayan Dana, Nyoman Astina, Gusde Cakranana, Made Suweca, Agung Nova et Kadek Sumartini.

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