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L’ambassadeur ionien des îles de l’Inde

« La diplomatie, c’est plus qu’un emploi, c’est un mode de vie », confie cet homme affable de 60 ans qui a passé sa vie entière à servir son pays. Lui-même fils d’ambassadeur, Charalambos G. Christopoulos a vécu ses jeunes années dans des pays aussi divers que la Turquie, Chypre, l’Union soviétique, la Belgique et la France. « Connaître les peuples » est une de ses grandes passions, à laquelle il faut ajouter les langues. En plus du grec, il parle français, allemand, anglais, espagnol, italien, serbe, croate, slovène, russe et s’est mis à l’indonésien, comme on peut l’imaginer, sans la moindre difficulté. Son ambassade est également la représentation grecque de la région pour la Malaisie, Brunei, Timor Leste et les Philippines.

Il y a bien plus de liens qu’on ne croit entre la Grèce et l’Indonésie. A commencer par les noms. « Indonesia signifie en grec les îles de l’Inde et a été utilisé pour la première fois par Ptolémée », explique l’ambassadeur. Et si le mot « yunani » qui désigne la Grèce en indonésien vous a plus d’une fois laissé perplexe quant à son étymologie, « sachez que ça vient de Ionien, un des peuples de la Grèce comme les Spartiates ou les Hellènes, il s’agit d’une terminologie employée surtout dans les pays orientaux », précise-t-il. Il n’y a qu’une centaine de ressortissants grecs en Indonésie et une cinquantaine en Malaisie, mais Charalambos G. Christopoulos a accepté ce poste avec enthousiasme. Il connaissait l’Indonésie pour avoir assisté à une conférence sur l’environnement en 2002 et avait pu découvrir à cette occasion, pendant plusieurs semaines de visite, les facettes de ce pays qu’il apprécie pour « sa nature et sa culture ».

La Grèce et l’Indonésie coopèrent sur de nombreux dossiers, notamment touristique. Etant une des destinations les plus prisées d’Europe, la Grèce est riche d’expériences en la matière et des accords de collaboration viennent juste d’être signés. En découlent indirectement d’autres accords, dans le registre du partenariat culturel cette fois, puisque les deux pays sont connus pour être des destinations « culturelles ». L’occasion d’aborder avec l’ambassadeur ces questions et de découvrir que l’épopée d’Alexandre le Grand, si fondatrice de l’identité occidentale, est aussi une légende incontournable de la culture malaise. Devenu « Iskandar » en indonésien, « il est ici admiré comme le roi musulman idéal, un saint », explique-t-il.

« On peut même visiter sa tombe au pied du mont Seguntang à Sumatra », poursuit l’ambassadeur avec malice. La tombe réelle du conquérant macédonien, supposée se trouver à Alexandrie, n’a cependant jamais été découverte et il est surprenant de voir une population musulmane aussi éloignée de la Méditerranée vouloir se l’approprier, comme l’a expliqué le spécialiste de la question, le Français Henri Chambert-Loir, dans un article. « Beaucoup de sultans malais se sont réclamés de sa descendance pour justifier leur pouvoir à travers les siècles », continue encore l’ambassadeur qui précise que la légende d’Alexandre le Grand, « Hikayat Iskandar Zulkarnain » en indonésien « a été transmise dans cette région du monde par des textes perses et arabes », et se trouve présente « jusque dans la culture bugis des Célèbes ou encore à Sumbawa et Bornéo ».

La culture malaise n’est pas la seule marotte de cet homme éclectique qui rappelle que son pays est aussi membre de la Francophonie et qu’il a célébré à ce titre la Journée Internationale de la Francophonie à son ambassade à Jakarta en mars dernier. En dehors des diverses activités de représentation typique de son métier, le dossier économique reste bien sûr la priorité de sa mission. De nombreux accords sont en chantier pour améliorer les échanges commerciaux entre les deux pays et surtout pour attirer les investisseurs grecs en Indonésie. La Grèce, qui possède toujours la plus grande flotte commerciale du monde, va également former des marins indonésiens dans un avenir proche. Le travail ne manque pas et Charalambos G. Christopoulos, en poste depuis neuf mois seulement, s’inscrit tout simplement dans la continuité de son prédécesseur. « Etre ambassadeur, c’est faire une course de relais », conclut-il.

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