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Elections: le parti démocrate sur la voie royale

S’il faut toujours un vainqueur dans une élection, l’élection législative indonésienne en a clairement connu deux. Le Parti démocrate d’abord, prétendument vainqueur avec plus de 20 % du vote populaire, et les instituts de sondages. Ces derniers avaient tous, depuis plusieurs mois, anticipé la tendance, leurs variations se jouant à quelques virgules. Du côté des vaincus, on retrouve les 37 autres partis engagés dans cette élection, tous ayant fièrement affirmé tout au long de la campagne leur objectif « réaliste » d’atteindre 20 % des suffrages. Une campagne, au passage, qui aura atteint des sommets d’inutilité tant le débat public et la présentation de quelconques programmes politiques auront laissé place au populisme et aux concerts de dangdut gratuits.

Il est cependant des vaincus plus vaincus que d’autres. C’est particulièrement le cas du Golkar. L’ancienne machine suhartiste, qui n’a jamais connu autre chose que les arcanes du pouvoir depuis sa création dans les années soixante, se retrouve cette année au coude à coude avec le PDI-P de l’invisible Megawati dans la lutte pour la seconde place avec environ 14 % des suffrages exprimés. Outre un énorme coup de frein quantitatif pour ce parti qui représentait encore la première force politique du pays lors des dernières élections, il y a cinq ans, avec plus de 21 % des voix, il n’est désormais pas insensé d’imaginer le Golkar dans l’opposition. Rappelons les règles : un parti ou une coalition de partis ne sont autorisés à présenter un candidat à l’élection présidentielle de juillet prochain qu’avec 25 % du vote populaire ou 20 % des sièges au Parlement. Le Golkar seul est loin du compte. Et Jusuf Kalla, son président et vice-président du gouvernement sortant, est dans une situation délicate. Poussé par son parti à se porter candidat pour l’élection présidentielle, il n’a cessé de se déclarer pendant toute la campagne législative comme « un meilleur et plus rapide leader » que le président Yudhoyono. Lestés de leur piètre score, Kalla et le Golkar n’auront pas l’occasion de le prouver aux Indonésiens. S’ils veulent rester au pouvoir, ils n’ont d’autre choix que de se soumettre au bon vouloir du Parti démocrate.

Ce dernier est donc le grand vainqueur des élections législatives. Il a presque triplé son score d’il y a cinq ans et pourrait même a priori se permettre de voir Susilo Bambang Yudhoyono (SBY) se (re)lancer seul dans la course à la présidence. Cela paraît toutefois improbable. SBY a souffert pendant tout son premier mandat de ne pas avoir un soutien fort et majoritaire au parlement pour mener sa politique et donc de se faire accuser d’immobilisme. Plusieurs options s’offrent désormais à lui. Il s’associe avec le Golkar dans la course à la présidentielle. Dans cette configuration, il serait intéressant de voir qui le président sortant choisira pour l’accompagner au poste de vice-président. Après les déclarations de Kalla, il n’est pas impossible de le voir choisir une autre figure du Golkar, qui devrait dès lors être Akbar Tanjung, celui qui a réformé le parti après la chute de Suharto, ou Agung Laksono, actuel porte-parole du parlement. Mais quid de Bakrie, Surya Paloh ou du Sultan Hamengkubuwono, tous figures majeures du Golkar ?
SBY peut aussi s’associer avec les partis musulmans, autres perdants des législatives, mais cela l’obligerait à envisager des politiques très impopulaires afin de contenter l’électorat traditionnel de ces partis. Qui a oublié la très controversée loi anti-pornographie ? Dans ce cas cependant, son vice-président pourrait être Hidayat Nur Wahid, président de l’autre chambre du Parlement, le MPR, et ancien leader du PKS, le premier parti musulman.

Enfin, le président peut, comme il y a cinq ans, s’appuyer sur ces deux options à la fois, s’assurant une majorité confortable au parlement mais diluant son pouvoir et augmentant les risques d’opposition interne au gouvernement. Les partis musulmans ont en outre annoncé qu’en cas de coalition entre le Parti démocrate et le Golkar, ils se rangeraient dans le camp de l’opposition. Mais chacun sait qu’en politique, en Indonésie comme ailleurs du reste, les promesses n’engagent que ceux qui les tiennent.

Comme lors de la dernière législature, et en cas de victoire de SBY à l’élection présidentielle, l’opposition devrait être menée par le PDI-P de Megawati. Celle-ci, aussi fantomatique qu’à son habitude, s’est assurée le soutien de deux nouveaux partis, Hanura et Gerindra, dans la course à la présidence. Que ces deux partis soient menés par deux anciens généraux, Wiranto et Prabowo, dont le respect des Droits de l’homme peut être questionné au vu de leur riche carrière militaire sous Suharto, ne semble pas lui poser de problème insurmontable.

Quoi qu’il en soit, et à la lumière des résultats des élections législatives, il semble difficile à qui que ce soit d’empêcher SBY de briguer un second mandat. Le premier, loin de la perfection, a néanmoins permis à l’Indonésie de restaurer la sécurité sur le territoire national, de maintenir la croissance et d’augmenter le poids du pays sur les scènes diplomatique et économique internationales, comme en témoignent la visite récente d’Hillary Clinton et la présence de l’Indonésie au sein du G20. Les investisseurs étrangers, essentiels au développement du pays, ne s’y trompent d’ailleurs pas. Ils voient l’Indonésie comme le troisième marché le plus porteur dans la région Asie-Pacifique, derrière la Chine et l’Inde. Puissent les cinq années à venir leur donner raison.

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