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Du travail de singe !

Alors que le soleil se lève sur une montagne boisée de la campagne de Sumatra, une vieille dame frit du riz dans un boui-boui au bord de la
route. Soudainement, deux singes descendent d’un arbre juste à côté et prennent une pleine poignée de nasi goreng de la poêle et s’enfuit, couinant et jonglant avec la nourriture chaude qui leur brûle les mains. La femme soupire et se plaint : « Ils sont tout le temps à me voler ma cuisine ! »

Ce sont des macaques à longue queue, ou kera en indonésien. Se nourrissant essentiellement de fruits, ces omnivores ne font la fine bouche devant aucun délice et avalent oeufs d’oiseaux, termites, popcorns, cacahuètes ou encore petits mammifères. Ils patrouillent les plages à la recherche de coquillages et de crabes et, dans les régions vinicoles de Bali, ils se gorgent de grappes de raisin. Le tourisme a également créé plein de nouvelles zones de cueillettes providentielles pour ses affamés très opportunistes. Considérés par certains autochtones comme des animaux sacrés, les macaques sont tolérés près des temples balinais et les forêts des
singes d’Ubud et Sangeh sont des attractions touristiques populaires. A cause de leur culot légendaire, les macaques sont donc l’espèce de singe la plus facile à rencontrer pour les touristes. Le Kecak, ou « danse des singes », qui prend ses racines dans des traditions anciennes, a en fait été inventé pour les touristes au siècle dernier. Avec près d’une centaine d’hommes assis à la lumière des torches, scandant ensemble et se houspillant comme des singes avec les bras en l’air, le Kecak est en effet une attraction spectaculaire. Enfin, dans la légende hindoue du Ramayana, Hanuman le singe blanc, général de l’armée des singes, est un féroce combattant des forces du mal.

Au temple d’Uluwatu, les touristes qui ne prêtent pas attention au signe « DO NOT FEED THE MONKEYS, KEEP VALUABLES OUT OF SIGHT ! » auront probablement leurs lunettes de soleil, boucles d’oreille ou appareils photo volés à l’arraché. Ailleurs, les macaques escamotent vêtements, passeports et portefeuilles des baigneurs insouciants partis faire trempette dans la mer. Sans oublier qu’une bande de macaques en maraude peut détruire une chambre d’hôtel en moins de deux si quelqu’un a laissé une fenêtre ouverte… Enfin, en tant que nuisance pour l’agriculture, ils sont évidemment redoutés par les cultivateurs. Ce qui fait que beaucoup ne voit en eux que de simples voleurs, d’incontestables trublions.

Haut perché sur les pentes du somnolent Batur, après une hardie grimpette de trois heures avant le lever du soleil et alors que je sirote du thé chaud en regardant le soleil apparaître derrière l’Agung, je suis rejoint par une troupe de macaques. Assis sur le bord de la caldera parmi les blocs de lave, dans cette épaisse brume du matin, ils ont incontestablement l’air de mystérieux
gardiens des esprits. D’autres personnes voient dans ces animaux un bon moyen de subvenir à leurs besoins. Au Pasar Burung de Denpasar, quantité de jeunes singes sont entassés dans des cages minuscules. Généralement
achetés sur un coup de tête, ils seront condamnés à vivre une vie de
solitaire, enchaînés à un arbre dans une arrière-cour. Chaque année, des
milliers de macaques sont exportés d’Indonésie à destination des laboratoires
de recherches du monde entier. Sans parler des montreurs de singes qui parcourent les kampung pour amuser les enfants avec un petit macaque qui a été cruellement entraîné à faire des numéros de cirque.

Récemment, la propriétaire d’un restaurant de Bali m’a lancé avec enthousiasme : « Revenez la semaine prochaine ! Nous aurons de la viande de singe très goûteuse ! » On se demande parfois…

Courriel à [->[email protected]] ou tél. 0813 3849 6700

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