Plus qu’un mets de choix, le porc est une religion à Bali, et aussi un signe distinctif dans l’archipel. Depuis deux ans qu’existe cette rubrique, nous avons écrit à plusieurs reprises sur la grande spécialité culinaire de l’île, le babi guling. Il est pourtant une région de Bali où l’on ne peut consommer de ce cochon de lait
rôti, c’est vers Kintamani. Nous avons donc rendu visite à Nyoman Keny Aryani qui tient un célèbre warung fondé par ses parents en 1973 devant le temple du banjar Penulisan (à quelques kilomètres au nord-ouest de Kintamani) pour lui en demander la raison. La réponse a été déconcertante mais finalement aisée à comprendre,
ça ne tient absolument pas à des raisons religieuses mais climatiques ! Eh oui, le froid qui règne à 1400 m d’altitude non seulement provoque une pellicule blanche sur le porc cuit au feu de bois mais de plus, cette couche rancit très vite. Alors, dans ce fameux warung,
on cuisine encore au feu de bois et les morceaux de porc et les saucisses sont mis à sécher au dessus de l’âtre. Ainsi, la viande ne rancit pas, le gras s’écoule tout doucement. L’odeur de fumée à laquelle on pourrait s’attendre a en fait disparu au moment où la viande est frite avant d’être servie.
Un des autres secrets livrés par Nyoman, c’est aussi le soin apporté à préparer le bumbu au mortier et non pas au mixeur. Dans ce warung sans nom, vous trouverez encore un très grand choix de krupuk au porc et de spécialités à base de porc dont du pepes au sang (cuisson à la vapeur dans une feuille de banane).
Si vous avez envie de quitter les routes balisées du tourisme pour vous immerger dans un warung qui n’a fait aucune concession à la modernité (d’ailleurs, côté hygiène, on note que les disciples de Ratatouille sont un peu trop présents), où des jeunes filles composeront votre assiette à la main et où vous ne croiserez que
des Balinais en tenue de cérémonie venus casser une graine avant d’aller prier juste en face, faites un tour du côté de Kintamani.
