Accueil Education

De l’art de ne pas fesser !

Il est des sujets qui ne cessent de susciter des réactions surprenantes, et s’il en est un qui déroute et dérange vraiment les Français, c’est la fessée. Chaque année, de retour au bercail, je m’amuse des remarques, hésitations, gênes et autres colères que suscite le sujet. La perle qui revient le plus souvent étant « oh, mais toi tu n’as jamais eu besoin de fesser ta fille, elle est si calme ! » ou comment, en quelques mots, transformer l’effet en cause… Mon enfant est-elle calme par nature ou parce que nous avons préféré le dialogue à la main leste ? Il est des parents qui me disent que seule la fessée peut calmer leurs enfants qui sont proprement insupportables. Le comportement difficile de leurs enfants n’est-il pas la preuve que cette méthode éducative est inefficace ? Il faut croire que toute logique déserte le cerveau humain lorsqu’il s’agit de l’éducation de sa progéniture.
Mais pourquoi être si farouchement opposée à la fessée ? Si sa pratique est encore largement répandue en Europe (selon une enquête de l’Union des familles européennes, 85 à 87% des grands parents et parents déclarent avoir recours aux punitions corporelles), la fessée est unanimement condamnée par les psychologues du monde entier et plusieurs études confirment le sentiment des parents qui, d’instinct, n’aiment pas frapper leurs enfants. Les psychologues américains Jerry Wyckoff et Barbara Unell expliquent, dans leur livre « Se faire obéir sans crier », que la fessée constitue le modèle des premières expériences des enfants avec la violence. Ils apprennent à être violents à cause de l’exemple donné par les adultes. Nous sommes des modèles et nos enfants absorbent, tels des éponges, chacun de nos comportements. Les fesser ou les gifler leur enseigne à résoudre leurs propres problèmes par l’agression physique. Comment leur enseigner la tolérance et la douceur si nous-mêmes les fessons ?
Par ailleurs, qu’y a-t-il de plus humiliant que d’être frappé, qui plus est par ses parents, les êtres que l’on aime le plus au monde ? Peut-on mesurer les dégâts que cause chaque gifle ou tape sur l’estime de soi ? Le médecin généraliste Gilles Lazimi a pu constater que les enfants fessés ou giflés par leurs parents deviennent souvent des adultes qui présentent des signes de dépression et d’anxiété, des troubles relationnels, des addictions, des états psychotiques et qui ont une pauvre estime de soi (ils ont par exemple tendance à accepter des boulots sous-payés.)

Si elle a l’avantage de mettre rapidement un terme à une situation insupportable et de soulager les parents, la fessée n’a aucune efficacité pour le changement à long terme du comportement. Les études scientifiques prouvent que la fessée met l’enfant dans un état de colère qui le rend opaque aux apprentissages.

Le célèbre pédiatre français Aldo Naouri estime que les châtiments physiques ne se justifient en aucune façon. La fessée est selon lui la solution qu’empruntent les parents qui hésitent entre éducation et séduction et qui souffrent d’une absence totale de détermination. Il existe des cultures, comme ici à Bali, qui ignorent l’usage des punitions physiques. Les petits Balinais sont-ils moins bien élevés que les petits Français, sont-ils plus turbulents, plus grossiers, plus impertinents ? Trente deux pays ont interdit par la loi les violences éducatives ordinaires en direction des enfants. En France, la pédiatre et députée UMP Edwige Antier a proposé une loi interdisant la fessée. Même si ce projet a été refusé, il montre bien que les mentalités évoluent. Des campagnes publicitaires anti-fessées sont diffusées sur nos écrans. La dernière, visible depuis le 22 juin 2013, montre l’effet d’une claque filmée par une camera de 1000 images seconde et commente « une petite claque pour vous, une grosse claque pour lui. »

Il est parfaitement possible de se passer de la sacro-sainte fessée tout en enseignant à nos enfants le respect. Respirons en comptant jusqu’à dix, prenons du recul, mettons notre enfant à l’écart si nécessaire, restons fermes mais ne levons plus la main sur nos bambins !

LAISSER UNE RÉPONSE

Please enter your comment!
Please enter your name here