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Baliwood : une vision pour la culture et l’art vivant à Bali

Ibu Claudine – c’est ainsi que la propriétaire, également designer de l’endroit, souhaite être appelée – l’affirme tout de go : « Baliwood est là pour promouvoir les jeunes artistes indonésiens, pour les aider à s’inscrire dans le contexte plus grand de la scène artistique internationale, pour les aider à rencontrer d’autres artistes venus d’ailleurs. » Dans ce but, cette riche mécène, également propriétaire de The Mansion, un établissement hôtelier très classique connu pour sa collection d’oeuvres d’artistes déjà confirmés, a fait appel à Meriem Peillet, une ancienne galeriste parisienne sortie des Beaux-arts et du Conservatoire, qui a également travaillé de nombreuses années dans l’édition en Italie. A elles deux, elles ont mis en marche ce projet d’hôtel-centre artistique dont l’animation est assurée par une association baptisée Art’s Link.

Pratiquement, Baliwood pourrait constituer un pôle artistique à nul autre pareil ici. Situé à Sayan, près d’Ubud, il est bien évidemment sur les terres historiques de la création artistique moderne à Bali. Et contrairement au très officiel Art Center de Denpasar, qui souffre des maux habituels de l’étatique Indonésie, Baliwood, qui est géré de façon entièrement privée, ouvrira ses portes à des artistes venus du monde entier. Comme c’est également un hôtel, les touristes amateurs d’art d’Ubud, peut-être lassés des collections des musées environnants, pourraient bien y trouver leur compte d’art vivant.

A cet effet, les artistes présents sur le site bénéficieront de tout une suite d’équipements et d’espaces pour leurs travaux : ateliers, galeries, scène couverte et en plein air, salle de conférence, etc. Toutes les disciplines
artistiques sont bienvenues, peinture, musique, photographie, sculpture,
théâtre, cinéma et même artisanat, de quoi satisfaire le dionysiaque comme l’apollinien…

Le site organisera chaque année un camp d’été qui s’inspire plus ou moins du fonctionnement des auberges de jeunesse. Les étudiants en art du monde entier pourront ainsi mettre à profit leur traditionnelle année sabbatique de fin d’études en séjournant quelques mois à Baliwood à un
tarif ultra-préférentiel. L’occasion pour eux de produire dans un environnement propice avec tous les équipements nécessaires et également d’exposer leurs travaux. En échange, ils devront faire preuve
de partage en donnant des cours ou encore en cédant certaines de
leurs oeuvres produites pendant la période. Une aubaine également
pour les artistes du cru. « Les artistes locaux viennent également
vendre leurs productions dans notre Art Market car ils bénéficient de
conditions avantageuses », ajoute la curatrice qui précise que Baliwood ne leur prend que 20% de commission sur les ventes.

Meriem Peillet a l’intention d’organiser des festivals par thème chaque année et des expositions d’artistes majeurs pour imposerBaliwood comme un endroit qui compte. Mais le centre a également besoin d’activités plus informelles pour être vivant. A ce titre, le comité Art’s Link met en place des marchés de l’art bimensuels, des marchés aux puces, des marchés
bio et même un marché aux fleurs. « Nous allons organiser des séminaires, par exemple pour la danse ou des cours de dessins et proposer des stage de thérapie par l’art », explique Meriem Peillet. Egalement à l’ordre du jour, un piano-bar et un food-corner dédié à la cuisine chinoise. Et parmi les projets pour cette fin d’année et au-delà,
une exposition sur le travail du verrier Ron Seivertson, une expo
de photographes vietnamiens, des thèmes par pays autour de la Chine et de l’Iran, des shows d’illuminations, des concerts et des spectacles de danses…

Baliwood a déjà présenté les étonnants collages de Paulus Sutrisno et la peinture classique de la Balinaise Mangku Mura Muriati (cf. La Gazette de Bali n°60 – mai 2010) avant l’ouverture officielle. Une exposition collective de dix peintres locaux baptisée « Hearsay » a été montrée en septembre mais, en ce moment, c’est Made Wianta qui tient l’affiche. Le flamboyant artiste balinais fait partie des quelques personnalités de l’archipel qui comptent sur la scène internationale de l’art. Divisée en deux parties, une de poésies écrites sur des supports variés et inattendus, une de dessins, cette double expo consacrée à Made Wianta affiche l’ambition
de Baliwood. « Je tenais absolument à réunir ces dessins qu’il produit tous
les jours sans intention de les montrer, comme des jets de sa puissance
créatrice », commente Meriem Peillet sur le volet de l’expo baptisé
« Skeleton in the Closet ». L’autre partie, dénommée « Mind Map », réunit des poèmes écrits sur des supports aussi improbables que des paquets de cigarettes ou des cornets de frites. « Le titre est déjà explicite », lance sobrement la curatrice avec un regard malicieux.

Comme Meriem Peillet le rappelle constamment, Baliwood est ouvert à
tout le monde. Artistes ou amateurs d’art, ou tout simplement touristes
avec assez d’exigence pour vouloir dépasser la ronde plan-plan des
pseudo-galeries et autre musées autoproclamés que propose Ubud
« la culturelle », souhaitons que le public saura reconnaître ce qui apparaît comme un concept nouveau. Ni squat alternatif destroy, ni galerie de croutes pour gogo, Baliwood devra donc imposer ses choix pour dynamiser l’art vivant d’ici et inscrire Bali comme un endroit de référence
internationale. Une chance que tous les acteurs concernés devraient
avoir l’intelligence de saisir avec enthousiasme.

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