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Balade sous-marine merveilleuse à Derawan

Ah, le bonheur de filer à toute allure sur un lagon turquoise ! Le bateau est lancé à pleine vitesse. Loin derrière, l’île de Derawan semble minuscule. Des ombres noires constellent les fonds marins : des tortues en balade matinale. L’horizon s’ouvre. Infini. Cette région du nord de Kalimantan, sur la côte de Berau, offre des plongées exceptionnelles. Et du snorkeling tout aussi fantastique.
Visite guidée.

Kakaban, c’est l’île de Robinson. Derrière sa jungle luxuriante qui plonge dans des eaux cristallines, elle abrite un mystérieux lac. Le visiteur tombe en arrêt devant cette étendue d’eau (5km² tout de même !) après avoir traversé une forêt sur un ponton de bois. Quel choc ! Pas une minute à perdre, les stars des lieux se cachent là-dessous. On se met vite à l’eau avec masque et tuba pour les voir de plus près : des colonies de méduses non urticantes ! Palau, en Micronésie, et Kakaban, ici en Indonésie, sont les seules îles au monde à accueillir des « jellyfish lakes. » Cet écosystème unique s’est formé par un processus géologique datant de plusieurs millions d’années. Sous l’eau, elles sont des centaines à se déplacer en nous fixant. Sentiment étrange de nager au milieu de ces drôles de bestioles composées à 95 % d’eau. Tout autour du lac, des coraux mous et multicolores sont dissimulés sous la mangrove.

Dans cette région, les spots de plongée sont légion. Autour de l’atoll de Maratua qui compte une île-hôtel très agréable, les fonds marins valent le détour. A Barracuda Point, les fans des profondeurs devront avoir le cœur solide. Une fois dans l’eau, les courants sont si forts qu’ils doivent s’agripper à la roche ou à des algues bien accrochées, les « queues de singe ». De là, ils observent un ban de barracudas de plus de mille individus, qui se déplace sans peine dans cette mer agitée. Plus loin, les thons, eagle rays et autres requins (à pointe noire, à pointe blanche ou de récif) font leur numéro. Il y en a pour tous les goûts ! Cette plongée assez technique se poursuit en se laissant porter par le courant dans un immense canyon sous-marin. Elle se termine plusieurs centaines de mètres plus loin, là où des courants chauds et froids se rencontrent. Effet « washing machine » garanti ! A Sangalaki, une autre île à une demi-heure de là en bateau, les raies Manta sont les vedettes incontestées. Elles sont nombreuses à venir profiter du riche plancton. Sans bouteille, il est possible de nager au milieu de plusieurs de ces gracieux fantômes. Pas de chance pour nous, elles sont restées cachées lors de notre passage. Une seule montrera le bout de sa longue queue accompagnée, non loin de là, par un requin léopard. Connue aussi pour son resort (dont les tarifs prohibitifs ne se justifient pas), l’île de Sangalaki est le refuge de nombreuses tortues qui viennent y pondre la nuit.

Autour de Derawan, on ne manquera pas non plus de s’offrir une plongée de nuit. Histoire de profiter de ces curieux reptiles en plein sommeil. Partout, plongeurs ou adeptes du snorkeling nageront avec elles. Elles sont si nombreuses qu’on ne remarque plus leur présence. Sauf quand l’une d’elle vous frôle à moins de vingt centimètres ! Il suffit de longer 25 mètres de corail avec un simple masque et un tuba pour observer les merveilles de ce monde du silence. Les minuscules nudibranches, des petits mollusques sans coquille, font la joie des passionnés de faune macroscopique. Les lieux sont si peu fréquentées que les rares visiteurs se sentent privilégiés. Une expérience unique.

La biologiste Maggy étudie les coraux malades de Derawan

« Depuis 2003, je viens régulièrement ici, sur l’île de Derawan. J’y séjourne deux mois pendant lesquels je fais deux plongées par jour. J’observe l’état des fonds marins et effectue tout un tas de prélèvements. Je représente le Centre d’Ecologie Tropicale Marine de Brême, en Allemagne. Dès 2006, nous avons vu apparaître une étoile de mer, l’Acanthaster planci. On la surnomme « la couronne du Christ ». Sa particularité est de dévorer le corail. Elle s’installe dessus et le digère en sortant son estomac. Une mort certaine s’ensuit. Ces étoiles de mer se reproduisent très rapidement. Une seule étoile peut pondre des millions d’œufs. On sait également que les larves se développent mieux dans des eaux polluées. La surpêche de ses grands prédateurs, comme les balistes et les tritons conques, favorisent encore leur développement. Aujourd’hui, c’est effrayant, certains fonds marins sont de véritables champs de squelettes. Ces étoiles de mer avancent comme une armée. Les conséquences sont catastrophiques. A court terme, il y aura moins de plongeurs dans la zone. A long terme, c’est beaucoup plus grave, l’écosystème dominé par les coraux va s’effondrer. L’érosion est déjà là. Une surface totalement plane va apparaître et les poissons n’auront plus de refuge. Ils iront ailleurs. Les tout petits crustacés vont disparaître. Les coraux vont mal un peu partout sur la planète. Pourtant, on répète souvent que ce sont « les canaris dans la mine », c’est-à-dire qu’ils sont les éclaireurs des catastrophes à venir. Si on ne fait rien, ces catastrophes sont pour demain ». CC

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