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Jalak Bali ou le succès d’une tentative de préservation

Certaines personnes affirment non sans raison que les tentatives de préservation des espèces sont globalement un échec. Malgré des millions de dollars injectés pour sauver leurs habitats, les populations animales emblématiques comme les tigres, les éléphants ou les rhinocéros sont toujours graduellement en train de disparaître. Bien sûr, il y a toujours des exceptions, par exemple lorsque des populations déjà en nombre critique ont pu être sauvées de l’extinction grâce à des programmes de réhabilitation en captivité, de protection de l’habitat, d’éducation et de respect des lois les concernant. Malheureusement, ces exemples sont minoritaires. La destruction des lieux de vie et le braconnage restent les raisons principales de la perte de nombreuses espèces, particulièrement dans les pays où la démographie galopante concerne des populations pauvres prêtes à tout pour se nourrir. Malgré des campagnes nous disant de ne pas acheter des animaux sauvages ou des produits comme la peau ou l’ivoire, il reste beaucoup de gens dans ce monde qui entretiennent ces marchés, pour être à la mode, pour le statut, pour se soigner par la médecine traditionnelle ou parce que la possession d’espèces menacées et protégées montre qu’ils sont au-dessus des lois.

L’étourneau de Bali (Leucopsar rothschildi) ou Bali starling en anglais est une espèce d’oiseaux particulièrement en danger. Propre à l’île, pour laquelle il est une mascotte connue sous le nom jalak Bali, ce joli petit oiseau de taille moyenne, avec son plumage blanc comme neige, ses ailes et son bout de queue noires et le bleu flashant de ses yeux, est une des espèces de volatiles les plus menacées au monde. On le voit sur la pièce de 200 roupies, ce qui en dit long sur sa valeur symbolique. Les étourneaux de Bali, aussi appelés Bali mynah, vivaient avant en multitude sur les côtes nord et ouest de l’île. Officiellement « découverts » par les naturalistes hollandais au début du 20ème siècle, il est pour le moins difficile de trouver la moindre référence à leur existence dans les lontar balinais. En moins de cent ans, leur nombre a diminué inéluctablement jusqu’à moins de 10 spécimens en 2005, tous cantonnés dans le Parc national de Bali Ouest (Taman Nasional Bali Barat). Valant plus de 3000 dollars américains au marché noir, il était donc très recherché et, avec un nombre de gardes forestiers insuffisant, facilement braconné la nuit. La destruction de son habitat et les pesticides ont contribué plus avant encore à son déclin (il se nourrit d’insectes et de
fruits). Il fut même déclaré éteint en liberté.

Heureusement, les étourneaux de Bali sont relativement faciles à nourrir en captivité et il y avait plusieurs milliers de spécimens dans les zoos et autres collections privées dans le monde. La donation de contingents captifs venus de l’étranger et des lâchers réguliers dans le parc national ont donné l’illusion que l’espèce avait survécu au moins dans ce lieu. Mais le braconnage, le non respect des lois et la perte de leur habitat restent des menaces majeures. Des méthodes inappropriées de relâche ont également été fatales à des oiseaux non préparés, qui sont morts rapidement ou se sont retrouvés à la vente sur un marché en moins d’une semaine. Et ce malgré des millions de dollars dépensés par les autorités pour leur protection et leur réintroduction.

Il est alors encourageant de voir un projet de préservation animale qui va contre la tendance. Il s’agit du projet de sauvegarde du Bali starling mené par l’ONG Friends of the National Park Foundation à Nusa Penida (cf. La Gazette de Bali n°38 – juillet 2008), une île au sud-est de Bali. Sous la supervision de son fondateur, l’ornithologue Bayu Wirayudha, et d’une petite équipe dévouée, le projet se concentre sur la réintroduction de spécimens captifs pour établir une nouvelle population sauvage. Ayant commencé avec seulement deux couples d’oiseaux importés du Royaume-Uni, ils ont démarré un programme d’élevage et de réhabilitation en 2006, avec la relâche de 64 oiseaux en 2006 et 2007. Travaillant avec les communautés de 41 villages de Nusa Penida, ce programme cherche à promouvoir la conservation par le biais de la coutume (awig awig) qui rend la protection de l’étourneau obligatoire pour tous les insulaires. En compensation, FNPF a dirigé une série de programmes de développement sociaux et économiques afin d’améliorer les conditions de vie des résidents sur l’île, comprenant des bourses scolaires, des classes d’anglais, du reboisement, des cours de danses balinaises, des débouchés commerciaux pour le tissage et la promotion éco-touristique de l’île.

Depuis le début de ce projet, les oiseaux ont constamment était surveillés par l’équipe et, en 2010, il y avait plus d’une centaines de spécimens répertoriés, une partie d’entre eux étant donc nés en liberté. Des photos prises en 2011 montrent des parents non bagués nourrissant leurs petits, indiquant qu’il s’agit au moins de la 2ème génération sauvage. Dix oiseaux supplémentaires sont relâchés chaque année en provenance de différents élevages afin d’entretenir la diversité génétique. Pour célébrer le 5ème anniversaire de ce programme, FNPF a également relâché 100 moineaux de Java (Padda oryzivora) le 10 juillet dernier. Cette espèce est presque éteinte à Bali.

Leur action n’a pas échappé aux critiques. Certains affirment que c’est une erreur de réintroduire une espèce ailleurs que dans son milieu d’origine parce qu’il est impossible de prévoir l’impact qu’elle aura dans son nouvel écosystème. Néanmoins, de telles méthodologies ont déjà été utilisées dans d’autres parties du monde lorsque elle se sont révélées nécessaires. Le projet Bali starling a même reçu l’approbation officielle lorsque le président SBY et son épouse ont relâché eux-mêmes plusieurs oiseaux lors d’une visite à Nusa Penida. Et lorsque la nouvelle population de volatiles de Nusa Penida sera autonome, il sera peut-être possible de la réintroduire sur leur territoire d’origine à Bali.

Ce projet nous apprend des choses importantes. La principale étant probablement que sans l’appui des communautés locales, les projets de sauvegarde animalières sont sans doute voués à l’échec. Souhaitons donc que ce symbole de la beauté naturelle continue d’être traité comme un trésor national et que son succès serve d’exemple ailleurs dans le monde !

Sur l’Internet à [www.fnpf.org->www.fnpf.org]
Contact: [[email protected]>[email protected]]

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